Une année à oublier, une leçon à retenir

Méditations spirituelles 30/12/2022

30 décembre 2022 | Adventiste Magazine

L’année 2019 n’a pas été formidable pour ma famille.

Parmi les nombreuses épreuves de cette année-là, nos moments les plus tristes sont survenus lorsque ma fille a été hospitalisée, que mon mari s’est cassé la clavicule et qu’un de nos amis proches est décédé.

Avec le recul, je pourrais penser que j’ai eu de la chance, conforté par le fait que tout cela s’est produit avant la pandémie de 2020, mais je m’égare.

Lorsque ma fille a été admise à l’hôpital pour une pneumonie, on nous a dit qu’un parent devait rester avec elle et que nous devions nous attendre à y rester jusqu’à sept jours.

J’étais reconnaissante de pouvoir rester, mais je me suis dite qu’il fallait un bon livre pour passer le temps à l’hôpital.

J’ai donc parcouru les étagères de la librairie de l’hôpital. J’ai froncé les sourcils en essayant de choisir le bon livre : il y avait tellement d’options, mais aucune ne semblait correspondre à ce que je ressentais.

Finalement, j’ai pris un livre de Philip Yancey, « The Question That Never Goes Away ». Intriguée, j’ai parcouru la quatrième de couverture pour trouver une phrase avec cette question : « Où est Dieu quand nous souffrons ? ».

En voyant comment je me sentais, il m’a semblé que le livre m’avait choisi.

J’ai acheté ce livre, mais je ne l’ai pas lu du tout pendant notre séjour à l’hôpital : c’était trop difficile de me concentrer sur la lecture pendant que ma fille luttait pour respirer.

La guérison de ma fille a progressé jour après jour et nous sommes finalement sorties de l’hôpital. Heureuses de pouvoir nous reposer dans la paix et le confort d’un environnement familier, notre paix a été rapidement brisée par un appel téléphonique de mon mari : il était tombé de son vélo, s’était cassé la clavicule et devait être opéré.

Pendant sa convalescence à la maison, il a pris le livre que j’avais acheté et l’a lu d’un bout à l’autre en une journée, puis a insisté pour que je le lise aussi. En lisant les premières pages, j’ai été frappé par l’explication que donne Yancey de l’étymologie du mot compassion, un mot d’origine latine qui signifie « co-souffrir » ou « avec celui qui souffre ». La compassion suggère plus que de la gentillesse ; la compassion a un impact physique et émotionnel significatif sur une personne.

L’auteur fait référence à une recherche universitaire qui a recruté des volontaires pour tester combien de temps ils pouvaient garder leurs pieds dans des seaux remplis d’eau glacée.

Les chercheurs ont observé que lorsqu’une personne pouvait entrer dans la pièce avec le volontaire, ce dernier était capable de supporter le froid deux fois plus longtemps que ceux qui souffraient seuls.

Les chercheurs ont conclu que « la présence d’une personne attentionnée double la quantité de douleur qu’une personne peut endurer ».

Lorsque quelqu’un traverse une période difficile, j’ai toujours peur de dire ce qu’il ne faut pas dire ou d’aggraver son état. J’ai tellement de doutes sur ce que je dois dire, sur la façon dont je dois le dire, que je risque d’en arriver au point de vouloir éviter le sujet, voire la personne elle-même. Mais avec ce que nous venons de découvrir, grâce à cette recherche, ne pourrions-nous pas dire que ma crainte était infondée ?

Il est difficile de surmonter le sentiment d’inadéquation lorsque quelqu’un souffre : c’est inconfortable et gênant. Cependant, j’ai appris que cet inconfort peut être crucial pour honorer la douleur d’une personne et comprendre la véritable compassion.

Yancey cite de nombreux événements tragiques qui ont amené les communautés à se rassembler pour « se tenir aux côtés de ceux qui souffrent » et montre les nombreuses façons dont les gens ont fait preuve de compassion envers les autres, à la suite d’une tragédie.

Le message fondamental adressé à ceux qui souffrent, dit-il, est simple : « Tu n’es pas seul ».

Je ne veux pas gâcher le livre en vous racontant trop de choses. Laissez-moi plutôt vous parler d’Alex*.

Mon mari et moi avions un bon ami, Alex, qui est décédé peu avant son 31e anniversaire.

Nous avons rencontré Alex par le biais de notre club de cyclisme local, alors que nous étions tous très jeunes. Il était une personne généreuse avec un sourire accueillant. Il se faisait facilement des amis et vous donnait toujours l’impression d’être la personne la plus intéressante qu’il ait jamais rencontrée.

Sa famille et ses amis le décrivaient comme le « labrador » des êtres humains, toujours heureux de vous voir.

Les funérailles d’Alex ont cependant été un événement angoissant pour les nombreux cyclistes qui étaient ses amis.

Je me souviens que mon mari recevait des appels téléphoniques et des textos d’amis qui ne savaient pas s’ils allaient ou non assister aux funérailles. Des hommes et des femmes qui étaient autrefois des cyclistes proches et compétitifs s’étaient éloignés au fil des années.

Les nombreuses raisons invoquées pour ne pas assister aux funérailles étaient parfois ridicules : certaines personnes ne faisaient plus de vélo et avaient perdu leur forme physique, d’autres avaient maintenant des cheveux gris et des rides, d’autres encore avaient divorcé. Cependant, je crois que la véritable raison derrière ces vaines excuses se cachait sous la surface. La douleur était presque insupportable, car les circonstances du décès d’Alex dépassaient notre entendement. Personne ne voulait connaître l’ampleur d’un tel chagrin, surtout pas seul au milieu d’amitiés perdues.

Le jour des funérailles, nous avons vu des « amis » qui ne s’étaient pas vus depuis des années mettre de côté leurs insécurités et leurs vieilles rivalités pour s’embrasser et se consoler. Côte à côte, ils se sont réconfortés mutuellement. Mon mari et moi avons été réconfortés par leurs bras autour de nous. Nous avons enfin pu faire notre deuil les uns avec les autres et soulager une partie de notre douleur personnelle, mais nous avons surtout pu honorer la douleur de la famille d’Alex, qui a trouvé force et encouragement en présence de plus de 400 personnes en deuil ce jour-là.

Je crois que Dieu nous a tous poussés à surmonter nos insécurités à ce moment-là, car il y avait des choses plus importantes en jeu. Dieu savait que nos cœurs avaient besoin d’être guéris par l’amour et l’espoir.

Il savait qu’ensemble, nous pourrions mieux supporter cette douleur indescriptible. Ce n’était pas par l’effort d’une seule personne, mais plutôt par la compassion entrelacée de plusieurs, que dans notre détresse nous avons trouvé le réconfort de notre Père céleste.

Anxieux, souffrants, mais côte à côte, les bras serrés l’un contre l’autre, cela a été une bénédiction et, pour moi, une preuve tangible de la présence de Dieu lorsque nous souffrons.

En repensant à l’époque où notre fille a été hospitalisée pour une pneumonie et à la fracture de la clavicule de mon mari, je suis reconnaissante pour les nombreuses visites des amis et de la famille. Ils ont été obligés de faire des efforts supplémentaires et de changer leur routine juste pour nous réconforter.

Les parents de l’école ont offert à notre famille des repas faits maison. Des collègues de travail nous ont envoyé un cadeau réconfortant. Les amis et la famille nous ont rendu visite.

Lorsque mon mari est tombé de son vélo, son ami l’a emmené à l’hôpital et est resté avec lui aux urgences, lui rendant visite chaque soir pendant que j’étais à la maison avec nos enfants. Notre ami a changé ses plans. Il a fait un effort. Il a fait un effort particulier.

Un autre a ramené notre voiture à la maison, a rangé en toute sécurité le vélo intact et nous a béni avec un pot de soupe qu’il avait préparé. Encore une fois, un effort spécial.

L’offre de la famille de s’occuper de nos enfants pendant que je me rendais à l’hôpital pour rendre visite à mon mari a été une aubaine. Mes parents ont nettoyé la maison et cuisiné pour nous tous.

Les actes de compassion des amis et de la famille qui se sont mis en quatre, sans attendre de récompense ou de reconnaissance, nous ont aidés à supporter une double dose de douleur et de détresse.

De ces expériences est née une épiphanie : la véritable compassion est inconfortable et difficile parce qu’elle est censée l’être.

La compassion signifie « souffrir avec ». La compassion honore quelqu’un qui est blessé ou qui souffre lorsque, avec humilité et dans la prière, nous nous présentons à lui au moment où il en a besoin. Nous pouvons accueillir tout sentiment d’inadéquation en sachant que c’est l’effort de Dieu, et pas seulement le nôtre, qui sera utilisé pour le bien.

Galates 6.2 déclare : « Portez les fardeaux les uns des autres et accomplissez ainsi la loi de Christ ».

Cela permet de répondre en partie à la question « Où est Dieu quand nous souffrons ? ».

Dieu se montre à travers nous. Lorsque quelqu’un traverse des moments difficiles et que nous changeons nos plans pour l’aider, lorsque nous nous asseyons avec lui dans sa douleur et l’aidons à porter son fardeau, nous lui apportons le réconfort de Dieu.

2 Corinthiens 1.4-7 le dit de cette façon :

« Il [Dieu] nous réconforte dans toutes nos détresses afin que nous puissions réconforter ceux qui se trouvent dans la détresse, grâce à l’encouragement que nous recevons nous-mêmes de la part de Dieu. En effet, de même que les souffrances de Christ abondent pour nous, de même aussi, c’est par Christ que notre réconfort abonde. Si nous sommes dans la détresse, c’est pour votre réconfort et pour votre salut ; si nous sommes encouragés, c’est pour votre encouragement, pour vous permettre de supporter les mêmes souffrances que celles que nous endurons. Et notre espérance à votre sujet est ferme, parce que nous savons que si vous avez part aux souffrances, vous avez part aussi au réconfort ».

Philip Yancey note que la compassion est notre témoignage chrétien. Il déclare : « Jésus n’a jamais fait de sermons sur le jugement ou sur la nécessité d’accepter la mystérieuse providence de Dieu lorsque les gens vivaient la douleur d’une tragédie. Au contraire, il a répondu par la compassion, le réconfort et la guérison. Dieu se tient du côté de ceux qui souffrent ».

L’année que je préférerais oublier nous a enseigné une leçon importante : se tenir aux côtés de ceux qui souffrent, accepter d’être mal à l’aise et se rappeler que Dieu unit notre compassion pour qu’elle honore, encourage et guérisse ceux qui souffrent.

Ma prière est que Dieu continue à travailler dans nos cœurs afin que nous soyons compatissants, pour que l’on ne se demande jamais où Dieu se trouve : il sera visible lorsque nous nous présenteront à côté de ceux qui sont seuls, lorsque nous préparons à manger pour ceux qui sont épuisés, lorsque nous nettoyons la maison pour ceux qui sont en deuil, lorsque nous gardons les enfants pour ceux qui souffrent, lorsque nous prions avec ceux qui ont le cœur brisé et lorsque nous asseyons avec eux dans un silence inconfortable lorsqu’il n’y a pas de mots.


*Ce n’est pas son vrai nom.


De Linzi Aitken
Source : https://record.adventistchurch.com/2022/07/28/a-year-to-forget-a-lesson-to-remember/
Traduction : Tiziana Calà