L’engagement de l’adventiste dans la société

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L’être humain est un être de relation. Il participe nécessairement à la société et ne peut s’en dissocier. C’est avec ses semblables qu’il développe ses apprentissages et construit une vie qu’il souhaite libre, sécurisée, épanouie. L’organisation et les règles de la vie sociale ont, au moins théoriquement, pour objectif idéal de garantir à chacun la possibilité d’être artisan de sa vie.

En retour, il est normal que tout homme – et le croyant n’échappe pas à cette responsabilité – contribue au bon fonctionnement de la collectivité dans laquelle il vit. De ce fait, il profite des avantages proposés et subit les inconvénients de la vie en commun. Il a besoin des autres et les autres ont besoin de lui.

Toutefois, une question se pose : Quelle est, dans la communauté des hommes, la place d’un chrétien, dont “la cité est dans les cieux” et qui, dans cette attente, est “étranger et voyageur sur la terre” ? Comment trouver une participation juste et féconde à la vie de la société sans se compromettre par une conformité au monde présent ?

Depuis l’apparition du péché, les rapports entre les humains se sont dégradés et sont devenus des rapports de domination et d’exploitation. Par ailleurs, aucun être humain ni aucune institution ne peut avoir une attitude parfaite. Comment se situer et s’intégrer dans une société qui est loin d’être idéale ? Ne faut-il pas plutôt s’en différencier ? Jusqu’où et comment est-il possible, et souhaitable aux yeux de Dieu, de s’engager ?

Pour beaucoup d’adventistes, la politique est un monde à part, souvent corrompu, imperméable à l’influence de l’Évangile. Pourtant, le monde de la politique est, au sens originel, celui de l’organisation de la cité, de la vie citoyenne, en d’autres termes, de la vie en société. Il y a donc politique et politique : il convient de ne pas procéder à un amalgame, facile il est vrai, entre deux notions très différentes véhiculées par le même mot.

La Bible nous donne plusieurs exemples d’hommes tels Moïse, David ou Ézéchias qui ont assumé des fonctions politiques importantes. Certains les ont exercées dans des conditions difficiles car c’était au profit de peuples inamicaux par rapport à Israël : Joseph en Égypte, Daniel à la cour de Babylone et de Suse, ou Néhémie, échanson du roi Artaxerxès.

Jésus n’a pas vécu une vie d’ermite, il s’est impliqué dans la société de son époque, mais il a posé des limites à cet engagement. Il a appelé ses disciples à être “le sel de la terre”. Par là, il les invite à être présents et à participer à la société en tant que citoyens à part entière. Cela signifie pouvoir en revendiquer les droits et en accepter les devoirs, en accord avec une conscience chrétienne. Le Nouveau Testament nous y invite. Certes, il ne fournit pas un manuel social, économique ou politique ; mais il donne des grands principes de base, pas toujours reconnus, il est vrai, à leur juste valeur, et il laisse à chacun la responsabilité de réfléchir aux aspects concrets d’action et d’engagement dans nos sociétés.

Jusqu’à une époque récente, les Églises avaient surtout la préoccupation de s’exprimer sur les questions de la sphère privée, sur des problèmes moraux (honnêteté, obéissance, respect, etc.), très souvent sexuels (adultère, divorce, contraception, rapports préconjugaux, etc.). Il est vrai que c’est une vocation majeure du chrétien, tout autant que des Églises. En effet, être disciple au sein d’une population plus ou moins détachée de Dieu implique de vivre l’Évangile et de se comporter, dans sa vie quotidienne, en conformité avec les exigences de sa propre foi et leurs conséquences éthiques.

De plus en plus, cependant, les Églises prennent conscience du fait que leur mission prophétique inclut également une dimension sociétale d’éthique économique et politique. Le chrétien ne peut qu’être interpellé par cette société injuste et par la misère vécue par les individus. L’influence chrétienne s’exercera par la spiritualité des fidèles, par leur réflexion, leur comportement, leur implication dans divers organismes de la société, leurs décisions et leurs actions face aux difficultés de la cité et du monde.

Jésus appelle ses disciples à être “dans le monde, mais pas du monde (1)”. Pour le croyant, ces paroles soulignent à la fois l’obligation d’action et la nécessité de vigilance sur la nature, les modalités et les limites de cet engagement. Le chrétien ne se permettra pas n’importe quelle attitude, même si elle est habituelle et considérée comme normale.

La présence du disciple peut se manifester dans des domaines et à des degrés divers selon les possibilités et les circonstances propres à chacun. Citons, entre autres formes possibles : la vie associative, l’action humanitaire, écologique, politique, syndicale, le service de l’État dans le cadre, par exemple, de la justice ou de la police.

Il est vrai que la nature ou les modalités de certains engagements peuvent gêner un adventiste. Qu’il s’agisse d’exercer une activité artistique, sportive, politique, de participer à des forces sécuritaires ou de sauvetage, le croyant risque d’être interpellé dans sa conscience, confronté à des difficultés fonctionnelles et placé devant des choix difficiles. Comment se situer face à des questions éthiques ou spirituelles comme l’honnêteté professionnelle, le travail le jour du sabbat, le port d’armes, etc. ? Ces situations nécessitent une réflexion communautaire et personnelle approfondie et une bonne hiérarchisation des valeurs. La Bible donne généralement la priorité au bien des personnes et à l’équité plutôt qu’à l’application stricte des règles.

La nécessité d’une réflexion sur ces sujets tient non seulement à l’existence de ce questionnement, mais surtout au fait qu’ils sont une occasion de présence et de témoignage au monde. Le message biblique affirme avec force que l’amour et le service de Dieu ne sont pas uniquement spirituels, mais également sociaux, ou plus exactement que cet engagement social est, en lui-même, spirituel.

Lorsque Dieu appelle les Israélites à être son peuple, il les appelle à rendre Dieu présent au monde. Les textes du Nouveau Testament montrent sans ambiguïté que la meilleure façon de servir Dieu, c’est de servir ses créatures (2). C’est l’expression d’une foi véritable. On ne peut pas dire que l’on sert Dieu en délaissant le service à l’humanité. Les incroyants regardent ceux qui se disent disciples du Christ et ils jugent de la valeur de l’Évangile d’après leur comportement.

Entre deux extrêmes, le militantisme radical d’une part, le refus de toute action politique et sociale d’autre part, il y a des attitudes dans lesquelles le chrétien peut s’inscrire en usant de sa liberté d’action, telle qu’elle découle de l’enseignement des Saintes Écritures (3) :

“Tout ce que vous voulez que les gens fassent pour vous, vous aussi, faites-le de même pour eux : c’est ici la Loi et les Prophètes.”

“Tout est permis, mais tout n’est pas utile ; tout est permis, mais tout n’est pas constructif. Que personne ne cherche son propre intérêt, mais celui de l’autre !”

Tout engagement sera subordonné à notre première vocation qui est de servir Dieu, mais aussi d’être “le sel de la terre”, à la gloire de Dieu.

COMMISSION D’ÉTHIQUE DE L’U.F.B., mars 2010


1 Jn 17.9-18.

2 Mt 25.31-46 ; Ga 6.7-10 ; Ja 2.14-26.

3 Mt 7.12 ; 1 Co 10.23,24.


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