« Ôtez vos souliers ! » Vous vous tenez sur une terre sainte

Méditations spirituelles 14/04/2022

Gary Blanchard | Adventist World, avril 2022

J’aime beaucoup faire des blagues. Mais il y a bien des années, j’ai poussé la plaisanterie un peu trop loin. À l’université adventiste que je fréquentais, il y avait, près de la faculté de religion, un jardin de prière. Plusieurs de mes camarades étudiants en théologie et moi y allions souvent pour prier Dieu de nous délivrer d’un autre examen d’hébreu, ou de nous aider à trouver une épouse.

Un jour, j’ai aperçu David, l’un d’entre eux, en train de prier seul dans le jardin. Je me suis approché de lui à pas de loup et me suis caché derrière un arbre. Puis, j’ai dit de ma voix la plus profonde : « David, ôte tes souliers ! Tu te tiens sur une terre sainte ! » Après quoi, j’ai risqué un coup d’œil pour voir comment il réagirait.

Je m’attendais à ce qu’il dise quelque chose comme « Ha ! Ha ! Gary, je sais que c’est toi ! » Eh bien non. Au lieu de ça, il a ôté ses souliers avec révérence ! Soudain, je me suis senti hautement coupable. Je suis sorti de ma cachette, et avant de déguerpir, je lui ai rapidement présenté mes excuses. Cette expérience, je ne l’oublierai jamais. Il faut dire que ce jour-là, celui qui s’était fait avoir, c’était moi ! Car David, contrairement à moi, a fait preuve d’une révérence authentique envers Dieu.

QU’EST-CE QUE LA RÉVÉRENCE ?

Le dictionnaire biblique KJV Bible Dictionary donne du terme « révérence » la définition suivante : « Crainte mêlée de respect et de considération »1. Dans les Écritures, les prêtres se déchaussaient afin de ne pas apporter de poussière ou de saleté devant Dieu. Ils montraient également leur révérence en se lavant, en ne défaisant pas leurs cheveux, et en revêtant leurs vêtements sacerdotaux avant de servir dans son temple (voir Lv 10.6 ; 16.4 ; 21.10, NBS)2.

La révérence, voyez-vous, c’est la façon dont on traite un roi ou un dignitaire. De nos jours, de nombreuses cultures et religions adoptent cette même manifestation extérieure de respect envers ceux qu’elles tiennent en haute estime. Par conséquent, il serait hors de question pour des millions de personnes de s’approcher du Roi des rois avec désinvolture ou insouciance !

Ceci dit, la révérence va bien au-delà du comportement extérieur ; elle s’étend à tous les aspects de notre vie. Lorsque nous vénérons et craignons Dieu, nous obéissons à ses lois. Le message du premier ange d’Apocalypse 14.7 dit : « Craignez Dieu, et donnez-lui gloire, car l’heure de son jugement est venue ; et adorez celui qui a fait le ciel, et la terre, et la mer, et les sources d’eaux3. » Ce passage fait clairement référence au sabbat, de sorte que l’on s’attend à ce que tous ceux qui révèrent Dieu obéissent à tous ses commandements (Ex. 20.8-11).

UN RESPECT PROFOND

Aujourd’hui, l’une des plus grandes lacunes au sein de l’Église est peut-être un respect profond pour Dieu. Ceci pourrait être dû au fait qu’on entend bien peu parler de sa sainteté. Mais notre Dieu est « mis à part » (saint) de l’humanité en amour, en pureté, en droiture, en justice, et en bonté. En fait, Dieu est tellement saint qu’il est décrit comme étant un « feu dévorant » (Dt 4.24 ; 9.3 ; He 12.29).

Dieu est bon, il est la source et le soutien de toute vie. Par conséquent, il serait fort imprudent de s’approcher de lui de manière irrévérencieuse. Nadab et Abihu, deux jeunes prêtres, l’ont appris à leurs propres dépens (Lv 10). Alors qu’ils étaient en présence même du Seigneur, ils ont apporté un « feu étranger » devant lui et ont été consumés sur-le-champ (v. 1,2).

Pourquoi ? Ellen White explique :

« Dieu voulut enseigner au peuple que l’on doit s’approcher de lui avec une grande révérence et selon ses prescriptions ; qu’il ne peut accepter une obéissance partielle »4.

Ces deux fils d’Aaron étaient pourtant au courant – ils savaient que Dieu leur avait ordonné de n’utiliser dans leurs encensoirs que le feu qu’il avait lui-même allumé. Non seulement enivrés par l’alcool, mais aussi grisés par leur position privilégiée, ils affichèrent une irrévérence téméraire envers Dieu (v. 9).

Pour que les Israélites ne soient pas amenés à croire à tort que Dieu est instable ou mesquin dans ses actes, il fut interdit à Aaron de pleurer publiquement la mort de ses deux fils. Il est dangereux de compatir publiquement à une vie irrévérencieuse et de jeter ainsi l’opprobre sur les jugements de Dieu.

Dieu aurait-il consumé Nadab et Abihu dans un accès de rage ? Non, nous dit la Bible, c’est sa sainte présence qui les consuma : « Alors le feu sortit de devant l’Éternel, et les consuma » (v. 2). Pourquoi ont-ils été consumés ? Dieu lui-même l’explique : « Je serai reconnu pour saint par ceux qui s’approchent de moi, je serai glorifié devant tout le peuple. » (v. 3, NBS) Ainsi, Dieu s’attend à ce que son peuple lui témoigne de la révérence !

La révérence ou respect envers Dieu se manifeste non pas par une obéissance partielle, mais par une obéissance totale à ses commandements. Dans Apocalypse 14.12, la Bible prédit que juste avant le retour de Jésus, il y aura un peuple qui attend ce retour dans un esprit de révérence envers Dieu : « C’est ici la persévérance des saints, qui gardent les commandements de Dieu et la foi de Jésus. »

L’ÉVANGILE

Et l’Évangile dans tout ça ? Où se trouve-t-il ? Comment pouvons-nous nous approcher de Dieu avec confiance alors que nous sommes souvent loin de la révérence qui lui est due ? Dans l’un des passages

les plus célèbres de la Bible, Jésus a dit : « Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. » (Jn 14.6) Lorsque nous lisons ce passage, nous avons tendance à l’interpréter uniquement comme une promesse. Mais c’est bien plus qu’une promesse – c’est aussi un avertissement ! Jésus dit qu’il est dangereux d’entrer en la présence divine sans passer par lui.

Il est intéressant de noter que Nadab et Abihu n’ont pas seulement apporté un « feu étranger » devant Dieu (Lv 10.1) – un acte d’une irrévérence flagrante envers le Créateur – mais aussi un feu ne provenant pas de l’autel sanctifié par le sang de l’agneau (Lv 16.12 ; Ex 30.10). En d’autres termes, ils ont osé se présenter devant le Père sans le sang expiatoire de Jésus.
Ils sont venus avec un feu de leur propre fabrication, c’est-à-dire qu’ils se sont présentés devant notre Dieu saint et redoutable avec les mérites de leur propre justice, et non avec les mérites de Jésus – non avec la justification par la foi que ce dernier leur a acquise par son propre sang (Rm 1.16,17). S’ils s’étaient conformés aux instructions divines, les choses auraient sans doute été bien différentes ! Dans 1 Jean 1.7, nous lisons : « Mais si nous marchons dans la lumière, comme il est lui-même dans la lumière, nous sommes mutuellement en communion, et le sang de Jésus son Fils nous purifie de tout péché. »

Ce dont nous avons besoin aujourd’hui plus que jamais, c’est d’une compréhension plus profonde de la sainteté de Dieu, et de l’importance de « marcher dans la lumière » (révérence) de sa présence. Nous verrons alors plus clairement notre grand besoin de Jésus, de sa grâce et du don gratuit du pardon, de la justice, et de la repentance. Alors, à l’instar de mon ami David, peut-être serons-nous plus prompts à ôter nos souliers en sa présence.

Plusieurs années après que ma blague dans le jardin de prière se soit retournée contre moi, j’ai rencontré David, lequel est devenu pasteur au sein de l’Église adventiste.

Il m’a dit qu’il n’avait jamais oublié cette expérience dans le jardin parce qu’elle était une réponse directe à sa prière ! Il priait, semble-t-il, pour que Dieu lui inspire une illustration dans le cadre du sermon qu’il préparait pour l’examen du cours de prédication. Son sermon s’intitulait : « Moïse et le buisson ardent » ! Le fait d’entendre subitement une voix lui dire d’ôter ses souliers l’a aidé à se connecter au message de façon tangible et lui a donné une illustration d’ouverture formidable. Il m’a dit qu’il avait décroché un A pour ce sermon. Merci, David, pour ton grand sens de l’humour ! Et merci de nous rappeler d’être respectueux en présence de notre Roi majestueux, saint, et plein de grâce.


1 « Reverence », King James Bible Dictionary, kingjamesbibledictionary.com/Dictionary/reverence.

2 Voir aussi Ellen G. White, Patriarches et prophètes, « Le sanctuaire et son rituel », chap. 30, p. 317-331. Sauf mention contraire, toutes les citations des Écritures sont tirées de la version Louis Segond 1910.

3 Sauf mention contraire, toutes les citations des Écritures sont tirées de la version Louis Segond 1910.

4 Ellen G. White, Patriarches et prophètes, p. 334.


Gary Blanchard est le directeur du Département du Ministère de la jeunesse de la Conférence générale des adventistes du septième jour.