On repart à zéro !

Méditations spirituelles 25/01/2021

Gerald A. Klingbeil | Adventist World Janvier 2021

Grâce, reconnaissance, et nouveaux commencements

« On rencontre parfois des gens, de parfaits étrangers même, qui nous intéressent au premier coup d’œil, d’une manière ou d’une autre, d’un seul coup, avant même qu’ils n’aient ouvert la bouche (1). » — Fiodor Dostoïevski

Aux jours du Messie, de nombreux auditeurs de Jésus et témoins de ses actes se sentirent remués comme jamais auparavant. Nicodème, chef juif bien branché, membre honoré du sanhédrin et pharisien respecté, était l’un d’entre eux. Comme bien d’autres Juifs habitant en Palestine à cette époque, il attendait la venue du Messie. Ayant consacré sa vie à l’étude de la Torah – la loi – il jouissait d’une profonde connaissance des Écritures.

UN ENTRETIEN NOCTURNE

C’est l’apôtre Jean qui raconte l’entretien nocturne entre Jésus et Nicodème (Jn 3.1-21). Nicodème décide de rencontrer le jeune rabbin de Nazareth à la faveur de la nuit. Son cœur a été remué – et cependant, un doute l’assaille encore. Il a donc pré- paré son entrée en matière avec soin : « Rabbi, nous savons que tu es un docteur venu de Dieu ; car personne ne peut faire ces miracles que tu fais, si Dieu n’est avec lui. » (Jn 3.2)

D’entrée de jeu, Nicodème est courtois et respectueux. « Rabbi » – ce qui signifie « maître, professeur » – est la façon appropriée de s’adresser à un chef spirituel. Notez par contre qu’il ne se compromet pas : il ne s’adresse pas à Jésus en tant que « Messie » ou « Christ » – même s’il a reconnu la source de ses miracles et de ses prodiges comme renvoyant finalement à Dieu.

Mais Jésus ne se laisse pas distraire par un titre ou un langage flatteur. Ne laissant aucune place à l’incertitude, il répond directement par une affirmation solennelle : « En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu. » (v. 3) Dans le texte grec, Jésus reprend un verbe (dunatai) dont Nicodème s’est servi dans son introduction par rapport à la capacité du « rabbi » de « faire » ces miracles. Ce verbe, il l’accompagne d’une condition – si – affirmant ainsi avec insistance qu’en dehors de la nouvelle naissance, on ne peut voir le royaume de Dieu.

Nicodème sait pertinemment ce que « faire » signifie. En bon pharisien, il s’est engagé à « faire » (ou « garder ») la loi. Mais que signifie naître de nouveau, ou « d’en haut » comme le rendent d’autres versions bibliques ?

L’image d’une nouvelle naissance n’est pas entièrement nouvelle pour Nicodème. Le judaïsme l’utilise pour décrire l’expérience des nouveaux convertis. La réponse très personnelle et pointue de Jésus, cependant, touche un point sensible chez ce docteur de la loi. « Il ne sent pas le besoin d’un changement, écrit Ellen White. D’où la surprise qu’il éprouve en entendant parler le Sauveur. L’application directe et personnelle des paroles de Jésus l’irrite. L’orgueil du pharisien lutte contre le désir sincère de connaître la vérité (2). »

La réponse de Nicodème à cette déclaration de Jésus trahit une partie de cette irritation. N’est-il pas absurde de dire qu’un vieil homme (comme moi) doit naître une seconde fois ? Allons, parlons plutôt de prophétie et de théologie ! Mais Jésus ne veut pas parler de prophétie ou de théologie. Il veut parler de Nicodème et de son besoin de naître d’eau et d’Esprit (v. 5).

Cette réaction de Nicodème, nous pouvons la comprendre. Nous n’aimons pas, nous non plus, que quelqu’un s’approche trop près de nous pour nous encourager – surtout si cette personne, c’est Jésus qui nous arrache de notre zone de confort. Heureusement, Nicodème ne tourne pas les talons pour disparaître dans les ténèbres de la nuit. Il reste pour entendre le jeune rabbin parler de ce nouveau départ. Il pose des questions (v. 9) et est très attentif. Lorsque Jésus lui présente l’exemple du serpent élevé dans le désert, il commence soudain à voir le rapport. Alors qu’il rentre chez lui soir-là, il est prêt à poursuivre sa recherche.

LA DÉCISION

Les évangélistes et les professeurs de théologie pratique ont longtemps étudié l’art d’aider les gens à prendre des décisions. Jésus semblait adapter son approche aux besoins et à la situation particulière de chaque individu. À certains, il disait simplement « Suis-moi » (Mt. 4.19 ; 8.22 ; etc.). À d’autres, il posait une question. Et qu’en est-il de Nicodème ? On ne dispose d’aucun document biblique concluant sur la façon dont sa conversation avec ce docteur de la loi s’est terminée.

Ellen White nous fournit quelques indications utiles : « Ce n’est pas par des controverses et des discussions qu’une âme est éclairée. Il faut regarder et vivre. Nicodème comprit et garda la leçon. Dès lors, il sonda les Écritures d’une manière différente, non pas pour discuter d’une théorie, mais pour vivifier son âme. Il commença de voir le royaume de Dieu parce qu’il se soumit à la direction du Saint-Esprit (3). »

La décision de Nicodème dut s’amplifier au fil du temps. Sa rencontre avec Jésus ayant eu lieu au début du ministère de ce dernier, il disparaît du radar des auteurs bibliques – à l’exception d’une brève référence dans Jean 7.50 où il rappela à ses collègues que, selon la loi biblique, Jésus ne devait pas être condamné sans qu’on l’ait d’abord entendu, sans avoir subi un procès en bonne et due forme. Ses collègues, hélas, accueillirent son intervention avec sarcasme.

Mais Nicodème ne sembla pas s’en formaliser, car la fois suivante où il apparaît dans le texte biblique, il apporte un grand récipient d’un mélange coûteux de myrrhe et d’aloès pour embaumer Jésus (Jn 19.39). Et tout à la fin, alors que la plupart des disciples avaient pris leurs jambes à leur cou, il se leva pour déclarer publiquement son allégeance envers Christ – une autre victoire pour le doux Guérisseur de Nazareth qui avait pris le temps de rencontrer cet homme qui cherchait vraiment le Messie.

UN NOUVEAU DÉPART

Où que nous le rencontrions – sur une route de Damas, lors d’une rencontre nocturne clandestine, dans un cercle familial où l’on célèbre le culte ensemble, dans une classe de maths ou d’histoire – Jésus est prêt à nous tendre la main de façon à ce que nous puissions le comprendre. Il ne pousse pas. Il ne manipule pas. Il se contente d’inviter.

Dès que nous reconnaissons notre besoin de sa grâce, notre cœur se met à déborder de reconnaissance. Quelque chose de nouveau commence à grandir. Une nouvelle naissance mène à un nouveau départ. Nous sommes impatients de partager ce don avec nos semblables. Nous sommes prêts à être en bénédiction à notre monde. Nous sommes enthousiastes à l’idée d’aller là où notre sauveur nous conduira. Pour certains, cela peut signifier un changement de culture et de pays ; pour d’autres, un service placide, régulier et engagé à titre d’enseignant de l’École du sabbat, de diacre, de musicien ou d’ancien dans une congrégation locale. Et pour nous tous, c’est un rappel quotidien de sa souveraineté créatrice, car Dieu seul peut faire de chacun de nous une nouvelle créature.

« Si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées ; voici, toutes choses sont devenues nouvelles. » (2 Co 5.17)


1 On peut trouver cette citation en anglais sur le site suivant : www. goodreads.com/quotes/92639-we-sometimes-encounter-people-even- perfect-strangers-who-begin-to.

2 Ellen G. White, Jésus-Christ, p. 152.

3 Ibid., p. 157.


Gerald A. Klingbeil est rédacteur adjoint de Adventist World.