Les deux principes de la générosité systématique

Méditations spirituelles 20/07/2020

Kevin M. Burtonm Université adventiste Southern, Tennessee (États-Unis) / Adventist World

Premier soutien du ministère de l’Évangile – et plus encore

Ceux qui connaissent l’histoire adventiste se souviendront que nos pionniers adventistes ont adopté un plan financier pour les dons – connu sous le nom de « Plan de générosité systématique » – précurseur de notre pratique actuelle de la dîme.

Lors de leurs déplacements pour prêcher l’Évangile, des pasteurs adventistes observateurs du sabbat tels que John N. Loughborough et John Nevins Andrews avaient du mal à subvenir à leurs besoins financiers. Découragés, certains finissaient par abandonner le travail de prédicateur. Devant cette réalité, nos pionniers prirent rapidement conscience de la gravité de la situation.

UN SYSTÈME CORRECTIF

Pour remédier à l’épuisement pastoral et faciliter la prédication de l’Évangile, les dirigeants de l’Église adoptèrent en 1859 un plan connu sous le nom de Plan de générosité systématique. Dans leur récit de notre patrimoine, les historiens soulignent que le système adventiste de la dîme est ancré dans le soutien financier aux pasteurs qui prêchaient activement l’Évangile. Ce récit « standard » n’est cependant qu’à demi vrai. L’un des deux principes de notre système de dîme a malheureusement été oublié, du moins dans le récit de notre histoire.

Selon l’historien religieux James Hudnut-Beumler, de nombreux chrétiens aux États-Unis commencèrent à promouvoir la générosité systématique au milieu du 19e siècle. La générosité systématique était enracinée dans « deux grands objectifs que Dieu avait placés devant l’humanité : prendre soin des pauvres et répandre l’Évangile »(1). Conscients de ces développements, et après avoir étudié attentivement la question, les dirigeants adventistes adoptèrent le plan de générosité systématique lors d’une session de la Conférence générale, laquelle se tint à Battle Creek, au Michigan, en juin 1859.

À l’instar de leurs contemporains non adventistes, les adventistes soulignaient que ce nouveau plan systématiserait la mission de l’Église en concentrant l’attention sur « les deux grands objets » de la générosité : le soutien financier et matériel envers les pauvres, les personnes âgées, les pasteurs, et les missionnaires.

UN NOUVEAU JOURNAL

Au cours de l’été 1859, Ellen et James White lancèrent une nouvelle publication pour promouvoir les deux principes de la générosité systématique. Ce nouveau journal s’intitulait The Good Samaritan (Le bon Samaritain). Malheureusement, seuls trois numéros, à ce qu’on sache, existent aujourd’hui. Le premier fait partie de ceux qui manquent, mais il parut probablement au début du mois d’août 1859 – environ un mois après l’adoption du plan de générosité systématique.

Ce journal trimestriel, promoteur de ce nouveau plan de dons financiers, fut « publié presque entièrement en référence à l’aide aux nécessiteux et aux personnes en détresse » sous la devise figurant sur son en-tête : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Mt 22.39) (2).

Le bon Samaritain fut volontiers approuvé lors d’une réunion d’affaires tenue le 7 août 1859 à Battle Creek, au Michigan.

On nomma un comité ayant la responsabilité « de recevoir les dons d’argent ou d’articles vestimentaires pour les pauvres ». Faisaient partie de ce comité entièrement composé de femmes Harriet N. Smith, Ann J. Kellogg, et Huldah Godsmark.

À vrai dire, les femmes étaient la force motrice du plan de générosité systématique (ce qui explique peut-être pourquoi il devint connu sous le nom de « Sœur Betsy » dans les cercles adventistes). Ce comité commença d’abord par nommer 48 agents – toutes des femmes – dans chaque État ayant une présence adventiste. Ces femmes devaient recueillir des fonds et des vêtements pour les pasteurs et les laïcs dans le besoin.

Ellen White, coéditrice de facto du journal, rapporta et publia personnellement les actions du comité dans le second numéro du Bon Samaritain, lequel parut en décembre 1859 (3).

Au cours des mois suivants, Ellen et James White « défendirent la cause des nécessiteux », donnèrent « force à cet appel », et « donnèrent l’exemple en donnant large- ment eux-mêmes ». Leurs actes en poussèrent d’autres à défendre les deux principes de la générosité systématique.

Par exemple, Abigail Palmer, de Jackson, au Michigan, acheta un livre pour que « chaque membre de la famille ou de l’église » puisse y consigner ses dons hebdomadaires en faveur « des veuves, des orphelins de père, et des pauvres parmi les observateurs du sabbat ».

Lorsque Lois J. Richmond lut pour la première fois Le bon Samaritain, elle pleura de joie parce qu’elle croyait que c’était le plan de Dieu pour son Église. Lois, bien qu’étant elle-même pauvre, était convaincue qu’elle pouvait encore contribuer à la cause. Elle y parvint en organisant un groupe d’adultes et d’enfants dont la tâche consistait à tresser des chapeaux en feuilles de palmier trois heures par semaine. On les vendait, et on achetait avec le produit de la vente « des vêtements pour les pauvres et les nécessiteux ». En un mois, le cercle de tressage de Lois avait recueilli « un peu plus de quatre dollars en argent et en vêtements ».

Elle envoya le tout à Ellen White, pour être distribué aux défavorisés et aux opprimés (4).

Le bon Samaritain fut apparemment publié avec une certaine régularité jusqu’au début de 1861. En mars de cette année-là, James White déplora le fait que trop peu de documents écrits avaient été soumis pour qu’on le publie, et déclara qu’il était pratique de ne le publier qu’occasionnellement. Après l’éclatement de la guerre civile en avril, il devint encore plus difficile de soutenir trois périodiques adventistes. Le dernier numéro connu du Bon Samaritain parut donc en juin 1861.

UN SYSTÈME CONTINU

Cependant, le plan de générosité systématique ne s’éteignit pas avec le journal. Alors que l’Église s’organisait officiellement et continuait à se développer, les pionniers adventistes continuèrent d’insister sur les deux principes de ce plan et d’agir selon ceux-ci.

Aujourd’hui, de nombreux adventistes ont oublié que notre système de dîme s’est développé à partir d’une com- passion collective pour les pauvres, les veuves, les orphelins et les personnes âgées, ainsi que pour le soutien des pasteurs et des missionnaires. Ce sont ces deux principes qui rendent notre mission systématique – une mission de générosité empreinte de compassion qui sert à la fois le corps et l’âme.


(1) James Hudnut-Beumler, In Pursuit of the Almighty’s Dollar: A History of Money and American Protestantism, Chapel Hill, N.C., University of North Carolina Press, 2007, p. 6-31 ; R. F. Cottrell, « From Bro. Cottrell », The Good Samaritan, décembre 1859, p. 8.

(2) J. N. Andrews, G. H. Bell, et U. Smith, Defense of Elder James White and Wife: Vindication of Their Moral and Christian Character, Battle Creek, Mich., Steam Press, 1870, p. 18, 19 ; Joseph Bates et U. Smith, « Business Meeting of B. C. Church », Advent Review and Sabbath Herald, 11, août 1859, p. 96.

(3) Bates et Smith ; E. G. White, « [Business Meeting of the B. C. Church] », The Good Samaritan, décembre 1859, p. 6 ; James White, « Eastern Tour », Advent Review and Sabbath Herald, 1er septembre 1859, p. 116.

(4) Abigail Palmer, « From Sister Palmer », The Good Samaritan, février 1860, p. 12 ; Lois J. Richmond, « From Sister Richmond », The Good Samaritan, décembre 1859, p. 8.


Kevin M. Burton est professeur d’histoire et de science politique à l’Université adventiste Southern, au Tennessee (États-Unis).

    1 comments

  • | 18/06/2021 at 11:00 am

    Très édifiant. Il y’a certainement beaucoup de témoignages constructifs pareilles à travers le monde. Ne serait-il pas d’en recueillir et éditer régulièrement pour le développement des membres et des églises. Parce que beaucoup ignore les principes fondateurs même de la dîme et voient en cela une sorte d’impôt que les pasteurs leur imposent. Mais, si l’on vulgarise ce genre de témoignages édifiant et historique, en citant d’autres peut-être plus proche d’eux ils souscriront avec conviction.