Les conspirations et la Conspiration

Méditations spirituelles 02/12/2021

Par : David Asscherick, orateur de Light Bearers, publié sur Adventist World, décembre 2021, pages 10 à 13

Il n’y a pas si longtemps, « la théorie du complot » était une expression que l’on n’entendait que sporadiquement, voire pas du tout. Aujourd’hui, il semble que presque tout le monde – depuis les présentateurs de bulletins télévisés jusqu’à notre voisin – parle de théories du complot de toutes sortes et de tous genres. Mais la militarisation de l’expression – l’accusation selon laquelle « ils » (qui qu’ils soient) défendent ou avancent une « théorie du complot » – a de quoi inquiéter davantage. Je crois que ces tendances à l’intégration et à la militarisation des théories de la conspiration devraient préoccuper les adventistes.

Il y a 20 ans, j’ai prêché un sermon intitulé Jésus et les théories du complot. C’est que j’avais reçu d’un saint bien intentionné un DVD de plus (c’était avant YouTube) exposant une sombre conspiration quelconque. Alors, en tant que prédicateur, j’ai fait ce que je pouvais : j’ai écrit un sermon à ce sujet. Même en tant que nouveau chrétien, je sentais qu’une foi biblique solide était incompatible avec les diverses théories du complot en vogue au début des années 2000. Heureusement, le sermon a toujours été bien reçu, et il semblait que les esprits plus sages et plus calmes aient eu tendance à prévaloir. Mais avec le rythme effréné de la modernité, le début des années 2000 semble être bien loin. Depuis lors, les théories du complot se sont transformées et multipliées.

LES THÉORIES DU COMPLOT – D’HIER À AUJOURD’HUI

Aujourd’hui, il y a des théories du complot à « droite » et à « gauche », et partout ailleurs aussi ! Vous voulez écarter rapidement quelqu’un, le discréditer même ? C’est simple : traitez-le de conspirationniste et le tour est joué.

Il n’y a pas si longtemps, les principales théories du complot en circulation étaient du genre « Qui a tué John F. Kennedy ? », « Le 11 semble suggérer que Ponce Pilate, l’infâme gouverneur romain qui n’était pas ami des Juifs, avait fait tuer des pèlerins juifs alors qu’ils étaient en train d’offrir leurs sacrifices dans le temple. Apparemment, leur propre sang s’est mêlé à celui de leurs sacrifices au sanctuaire. Pour tout Juif, cette scène atroce aurait été totalement décourageante et répugnante ! Le fait que Jésus y fasse référence semble indiquer qu’il s’agissait d’un événement récent, peut-être même d’un « scoop ». Le message est clair : il pouvait être dangereux d’être un juif dévot dans un monde romain.

Après l’introduction sinistre de Luc, un peu plus loin dans le chapitre, on arrive au verset 31 : « Ce même jour, quelques pharisiens vinrent lui dire : Va-t’en, pars d’ici, car Hérode veut te tuer. » Bien que Juif, Hérode exerçait le pouvoir de Rome en tant que souverain vassal de la Galilée et des régions environnantes. Comme le cruel Pilate au début du chapitre, Hérode, un être sans scrupules, était sans doute prêt à éliminer des ennemis politiques, des Juifs trop dévots ou des messies futurs. Rappelons que le père du roi, Hérode le Grand, avait déjà ordonné la mise à mort de tous les mâles juifs âgés de deux ans et moins à Bethléhem et dans les environs (Mt 2.16-18). Il est clair qu’Hérode et ses partisans étaient une force avec laquelle il fallait compter.

La réponse de Jésus à l’avertissement des pharisiens a été parfaite, remarquablement courageuse, et profondément révélatrice. « Il leur répondit : Allez, et dites à ce renard : Voici, je chasse les démons et je fais des guérisons aujourd’hui et demain, et le troisième jour j’aurai fini. » (v. 32) Ainsi, Jésus a rejeté catégoriquement la menace à peine voilée d’une violence conspiratrice de la part d’un gouvernement impitoyable et corrompu, ce qui est extrêmement instructif pour nous aujourd’hui. Voici ce qu’il a dit en substance : « Et alors ? Moi, j’ai du travail à faire. » La réponse de Jésus se poursuit au verset 33 : « Mais il faut que je marche aujourd’hui, demain et le jour suivant ».

Examinons de plus près ces paroles de Jésus. Chaque phrase, bien que brève, en révèle beaucoup sur la manière dont Jésus se comportait devant les menaces des conspirateurs.

« Allez et dites à ce renard ». Ici, Jésus révèle qu’il est au courant des menaces et des intentions rapportées d’Hérode. S’il comprend parfaitement la situation, en revanche, il n’en est guère absorbé. Il s’agit là d’une distinction importante. En utilisant cette image de renard, Jésus montre qu’il sait qu’Hérode est réputé pour son intelligence et sa cruauté, mais qu’il reste néanmoins impassible, comme le révèlent les autres phrases clés.

« J’aurai fini ». Jésus marche au son d’un tambour différent. L’identité et la mission de Jésus transcendent la conspiration d’Hérode, tout comme le soleil s’élève de façon incompréhensible au dessus des nuages. Jésus est en mission, et il n’y a rien qu’Hérode puisse faire pour l’arrêter.

« Mais ». Une expression similaire serait « Eh bien, néanmoins » ou « Quoi qu’il en soit ». Ici, le rejet ciblé de Jésus est pleinement affiché. Cette impassibilité n’aurait pas échappé aux messagers pharisiens, à ses propres disciples ou à la foule toujours plus nombreuse, lesquels s’attendaient sans doute à ce que Jésus batte en retraite par crainte du « renard ».

« Il faut que je marche ». Jésus joue aux échecs alors que ses ennemis déclarés jouent… aux dames ! Il se situe à un autre niveau. Son identité et sa mission transcendent totalement les conspirations apparemment urgentes et dangereuses qui gravitent autour de lui.

Mais revenons à notre question précédente : Alors, en tant que chrétiens, comment devons-nous réagir par rapport à tout ça ? La réponse courte, et la réponse la meilleure, est la suivante : faire comme Jésus a fait.

Jésus comprenait la différence entre les conspirations et la Conspiration.

Il a gardé la vue d’ensemble. Était-il conscient des conspirations qui l’entouraient ? Bien sûr que oui ! Mais a-t-il été consumé par elles ? Non, tout le contraire. Comme nous l’avons noté, il a essentiellement dédaigné leur importance relative par rapport à sa mission et à son identité, lesquelles étaient infiniment plus importantes.

Les paroles de Jésus lors d’une autre conversation avec les pharisiens offrent davantage de précisions : « Quand vous aurez élevé le Fils de l’homme, alors vous connaîtrez ce que je suis, et que je ne fais rien de moi-même, mais que je parle selon ce que le Père m’a enseigné. Celui qui m’a envoyé est avec moi ; il ne m’a pas laissé seul, parce que je fais toujours ce qui lui est agréable. » (Jn 8.28,29) Jésus avait une mission bien précise. Cherchant toujours à « plaire » à son Père, il a vécu une vie d’adoration et de loyauté ininterrompue. Il est notre exemple infaillible.

QU’EN EST-IL DE NOUS ?

Certaines des conspirations d’aujourd’hui sont-elles réelles ? Sans aucun doute. D’autres, fantaisistes, spéculatives, et ultimement, fausses ? Sans aucun doute.

Aucune de ces réponses ne devrait surprendre le chrétien instruit de la Bible. Le monde est déchu. La corruption, la cupidité et l’injustice sont la règle, pas l’exception. C’est ce que Paul a rappelé au jeune Timothée : « Mais les hommes méchants et imposteurs avanceront toujours plus dans le mal, égarant les autres et égarés eux-mêmes. » (2 Tm 3.13) Nous vivons à une époque qui n’est pas sans rappeler la majeure partie de l’histoire, où le pouvoir – militaire, financier, social, institutionnel – est consolidé entre les mains de quelques-uns. Dans ces conditions, il faut s’attendre à des conspirations et à des injustices. Ne soyons pas surpris de ce que des individus non convertis et sans scrupules aient soif de pouvoir et de contrôle. Ils utiliseront tous les moyens disponibles – illégaux, contraires à l’éthique, ou autres – pour accroître leur pouvoir et leur contrôle. C’est là le monde dans lequel nous vivons. Mais c’est aussi le monde que Jésus est venu éclairer et sauver.

Le mal est réel, mais la justice, la grâce et la miséricorde le sont aussi. Jésus a établi un royaume sur terre – un royaume construit sur le fondement inébranlable de la bonté et du gouvernement de Dieu. Nous sommes appelés à être des citoyens terrestres de ce royaume céleste, à être dans le monde mais pas du monde (Jn 17.11, 14-16).

Nous sommes appelés à résister à l’attrait des conspirations au « c » minuscule, en constante évolution et souvent incessantes, et à nous souvenir, à l’instar de Jésus lui-même, de calibrer notre identité et notre mission en fonction de la Conspiration au « C » majuscule. Lucifer a lancé une conspiration cruelle dans les parvis célestes mêmes, cherchant à dénigrer le caractère plein d’amour et juste de Dieu et de son gouvernement. Mais Dieu « a conspiré » pour gagner la guerre par l’amour.

RÉSUMÉ

En résumé, voici quelques conseils simples pour vous aider à comprendre les théories du complot que vous rencontrez.

1. En tant que chrétien, rappelez-vous qui vous êtes et pourquoi vous êtes ici. Ne perdez pas de vue une seconde l’identité et la mission que Dieu vous a données. Jésus savait qui il était et pourquoi il était ici (Lc 19.10 ; Mt 20.28). Il devrait en être tout autant pour nous ! Souvenez-vous que Jésus était si focalisé sur sa mission, et si engagé dans l’œuvre de sa vie qu’il a pu dire dans sa jeune trentaine : « Je t’ai glorifié sur la terre, j’ai achevé l’œuvre que tu m’as donnée à faire. » (Jn 17.4)

2. Gardez la vue d’ensemble. Oui, certaines conspirations sont plus que de simples théories. Mais en tant que croyants de la Bible, nous devons d’abord nous focaliser sur la grande Conspiration entre le bien et le mal. C’est la seule conspiration qui devrait nous absorber.

3. L’obsession d’allégations non prouvées et d’une spéculation sans fin peut nous entraîner sur un terrain dont on n’échappe pas facilement. Rappelez-vous l’appel et le message prophétiques de l’Église. En tant qu’étudiants de Daniel et de l’Apocalypse, nous avons le privilège de savoir quelles sont les vraies questions et, par extension, celles qui n’en sont pas. Restez rivé au message des trois anges d’Apocalypse 14.

4. Pensez de façon évangélique, et non combative. Nous ne sommes pas appelés à gagner des arguments, mais à gagner des cœurs et des âmes à la merveille, à la beauté et à la justice de Dieu telles que révélées dans son Fils, notre sauveur Jésus-Christ.

Dans la déclaration suivante, je crois qu’Ellen White a résumé l’ensemble de ces quatre points. Méditons-la, mémorisons-la, et partageons-la : « En un sens tout particulier, les adventistes ont été suscités pour être des sentinelles et des porte-lumière. Le dernier avertissement pour un monde qui périt leur a été confié. La Parole de Dieu projette sur eux une lumière éclatante. Leur tâche est d’une importance capitale : la proclamation du message des trois anges. Aucune œuvre ne peut lui être comparée. Rien ne doit en détourner notre attention*. »


* Ellen G. White, Évangéliser, p. 115.


David Asscherick est l’orateur de Light Bearers et un cofondateur de ARISE, un ministère de formation et de discipulat. David et Violeta, sa femme, et leurs deux fils aiment les randonnées, l’escalade, la pêche à la mouche, l’observation des oiseaux, et la photographie. Ils habitent dans l’État du Colorado, aux États-Unis.