Le seul Dieu, le seul Éternel

Méditations spirituelles 20/12/2022

Ángel Manuel Rodríguez | Adventist World, décembre 2022

Que signifie la citation suivante : « L’Éternel [Yahweh], notre Dieu, est le seul Éternel » (Dt 6.4) ?

Voici la citation complète : « Écoute, Israël ! l’Éternel [Yahweh], notre Dieu [’elohim], est le seul Éternel [Yahweh]. » (Dt 6.4) Ce verset, appelé le Shema, est d’une importance fondamentale dans la foi juive – le mot hébreu « Shema » est traduit par « Écoute ». Il s’agit d’un appel lancé à Israël pour qu’il écoute l’Éternel/obéisse à l’Éternel. La signification du reste du verset est sujette à débat.

INTERPRÉTATIONS POSSIBLES

La déclaration « l’Éternel, notre Dieu, est le seul Éternel » est difficile à interpréter pour plusieurs raisons : 1) nous n’avons pas d’autre phrase nominale biblique comme celle-ci ; 2) en général, le numéral un (‘ekhad) n’est pas utilisé avec un nom de personne ; 3) il manque un verbe dans la déclaration complète. Dans les clauses nominales, on fournit habituellement le verbe « être ». Sur la base d’un consensus érudit, la traduction la plus probable est la suivante : « L’Éternel [est] notre Dieu/L’Éternel notre Dieu, l’Éternel est le seul Éternel ». Qu’est-ce que ça signifie ? Certains diront qu’on parle ici de monothéisme – il n’y a qu’un seul Dieu, l’Éternel. D’autres y voient l’adoration exclusive de l’Éternel (« l’Éternel est notre Dieu, l’Éternel seul/unique » ou « le seul Éternel »). Certains de ceux qui retiennent la traduction « l’Éternel […] est le seul Éternel » comprennent que l’Éternel n’est pas un Dieu régional (par exemple, le Dieu de Samarie ; le Dieu de Jérusalem) adoré de différentes manières – l’Éternel est le seul et le même partout.

Y A-T-IL UNE ISSUE ?

Compte tenu des difficultés associées à ce passage, les érudits ne proposent que des lectures possibles. Si la traduction la plus naturelle est : « l’Éternel est notre Dieu, l’Éternel est le seul Éternel », il est clair que nous avons affaire ici à deux déclarations ou prédicats concernant Dieu : il « est notre Dieu », et il « est le seul Éternel ». La première conduit peut-être à ce que le texte poursuit : « Tu aimeras l’Éternel, ton Dieu, de tout ton cœur » (v. 5). La seconde concerne probablement l’unité et l’unicité de l’Éternel. La racine verbale ‘akhad, liée au numéral « un/’ekhad », signifie « être uni ». Peut-être que l’accent est mis sur l’unicité et le caractère unique de Dieu dans le sens où il n’y a personne comme lui ; il est unique en son genre. C’est essentiellement le monothéisme biblique (Dt 4.35), soutenu par Zacharie 14.9 qui, faisant écho au Shema, envisage un avenir où toute personne rivalisant avec Dieu pour la suprématie sera vaincue, et où « l’Éternel sera le seul Éternel, et son nom sera le seul nom. ». Il sera adoré comme celui dont la nature même (c’est-à-dire son nom) est une (Ex 3.13-17) ; il n’y en a pas d’autre comme lui.

UN SEUL DIEU

Le Shema est mentionné dans le Nouveau Testament, déclarant le fait que Dieu est effectivement unique, le seul Dieu (par exemple, Mc 12.19 ; 1 Tm 2.5 ; Jc 2.19). Une telle déclaration est une conviction biblique non négociable qui a été affirmée sans conteste par le christianisme tout en enseignant une pluralité au sein de la divinité. Cela est possible, car le chiffre « un » peut être utilisé pour désigner une seule unité qui inclut en son sein une pluralité. Là-dessus, Genèse 2.24* (S21) est le passage le mieux connu : « l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme, et ils ne feront qu’un [‘ekhad] » ; dans ce verset, un est constitué par deux personnes. L’allusion sans doute la plus étonnante au Shema se trouve dans 1 Corinthiens 8.6, où Paul identifie « un seul Dieu » au Père et « un seul Seigneur » (grec : kurios) à Jésus-Christ, précisant que Jésus appartient à la conception biblique de l’unité du seul Dieu**.


* Sauf mention contraire, toutes les citations des Écritures sont tirées de la version Louis Segond 1910.
** Voir Richard Bauckham, Jesus and the God of Israel, Grand Rapids, Mich., Eerdmans, 2008, p. 210-218.


Ángel Manuel Rodríguez a pris sa retraite après avoir servi en tant que pasteur, professeur, et théologien.