Jésus : le Dieu de proximité

Méditations spirituelles 13/04/2022

Sarah Gane Burton | Adventist World, avril 2022

Un lépreux vit en solitaire depuis fort longtemps. La lèpre a ravagé son corps, mais la séparation forcée de la société, elle, a ravagé son cœur. Alors qu’il se dirige vers le Prédicateur, les gens se dispersent, épouvantés par sa maladie repoussante – rappel ô combien douloureux de sa solitude !

Il ne faut que peu d’imagination pour compatir à l’isolement de ce lépreux. Depuis l’apparition de la COVID-19, nous avons connu des confinements, des quarantaines ; des tas de gens ont perdu des êtres chers. Comme le lépreux, nous avons une conscience aiguë de notre propre mortalité, de notre besoin de communauté et de guérison.

Le voilà enfin devant Jésus ! Il se jette à ses pieds et le supplie :

« Seigneur, si tu le veux, tu peux me rendre pur1. » (Lc 5.12) Jésus tend la main et, avec une tendresse infinie, touche l’intouchable. L’impureté et la maladie du lépreux ne peuvent pas nuire à la Source de pureté. Au contraire, le toucher de Jésus et ses paroles « Je le veux, sois pur » (v. 13) transforment l’homme physiquement, socialement, et spirituellement.

LE MINISTÈRE DE JÉSUS

Jésus s’associait fréquemment à ceux que la société jugeait « intouchables ». Plus loin, Luc 5 raconte que Jésus et ses disciples ont mangé avec Lévi et ses invités. Les pharisiens et les scribes se plaignaient de ce que Jésus se mettait à table avec « les publicains et les gens de mauvaise vie » (Lc 5.30), mais Jésus n’en avait cure. Comme la maladie du lépreux, le péché de ceux qui l’entouraient ne représentait aucune menace. En fait, c’était précisément les pécheurs qu’il voulait côtoyer !

La guérison du lépreux et l’amitié de Jésus avec les pécheurs s’inscrivent dans le cadre de la prophétie dont il s’est réclamé en tant que déclaration de mission au début de son ministère : « L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres ; il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour publier une année de grâce du Seigneur. » (Lc 4.18,19)

En Christ, Dieu ne s’est pas contenté d’envoyer un autre prophète, non, mais son propre Fils, afin qu’il habite avec l’humanité et la serve, afin d’être « Dieu avec nous ». Jésus a affronté le péché et ses conséquences de la façon la plus tangible possible : en touchant les lépreux, en ressuscitant les morts, en chassant les démons, en éprouvant la faim et la soif, en subissant la souffrance, et en triomphant de la tentation. Au lieu de reculer devant ce que nous considérons comme les aspects les plus sordides de l’humanité, il s’est plongé dans la fange pour secourir ceux qui imploraient sa miséricorde, tout en restant le pur et saint Fils de Dieu.

LA MORT DE JÉSUS

On ne peut parler de l’incarnation de Jésus sans parler aussi de la croix. Alors même qu’il tenait l’enfant Jésus dans ses bras, Siméon a prophétisé la gloire et la tragédie qui attendaient le Fils de Dieu (Lc 2.28-35) – Jésus était « né pour affronter sa passion ». Au cours de son ministère, il a touché les lépreux et mangé avec les pécheurs, mais sur la croix, il est devenu le paria2. Il n’y a pas eu de séparation entre l’humanité pécheresse et lui. Pour vaincre la pandémie du péché, Jésus est devenu péché (2 Co 5.21).

La croix répare la brèche entre l’humanité et Dieu et renverse « le mur de séparation, l’inimitié » au sein de l’humanité (Ep 2.14). En Christ, il n’y a « [ni] étrangers, ni […] gens du dehors » (Ep 2.19). « Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il se charge chaque jour de sa croix, et qu’il me suive. » (Lc 9.23) Cet appel radical que Jésus lance est un appel à l’imiter dans son humilité, à s’engager envers les autres et à agir en leur faveur, même (et surtout) lorsque la société les juge indignes, impurs, ou intouchables.

Le théologien James Cone écrit :

« La croix est le symbole le plus puissant de la tendre solidarité de Dieu envers les « plus petits » – envers les indésirables de la société qui subissent quotidiennement de graves injustices. Les chrétiens doivent affronter la croix – cette terrible tragédie – pour ce qu’elle a été, et y découvrir, par la foi et la repentance, la joie libératrice du salut éternel »3.

LA RÉSURRECTION DE JÉSUS

Par la résurrection de Jésus, ce qui a été accompli à la croix devient accessible. Ceux que Jésus a guéris et ressuscités des morts ont fini par mourir – leurs corps guéris demeuraient soumis aux conséquences du péché. Mais la résurrection promet que le péché et la mort n’auront pas le dernier mot. Jésus a triomphé de la tombe !

L’offre universelle de la vie éternelle proclamée en Jean 3.16 ne laisse aucun doute : Dieu accorde à tous le don de la vie de son Fils. Le message de l’Évangile doit être proclamé dans le monde entier. Tous ceux qui l’acceptent sont sur un pied d’égalité devant Dieu. Tous sont les bienvenus à la table du banquet céleste – peu importe leur richesse, leur statut, leur origine ethnique, ou leur profession (Mt 22.1-10).

Après la pêche miraculeuse dont il venait d’être témoin, Pierre est tombé aux genoux de Jésus et s’est écrié :

« Seigneur, retire-toi de moi, parce que je suis un homme pécheur. » (Lc 5.8) Mais au lieu de l’écouter, Jésus l’a invité à se joindre à son œuvre (Lc 5.10). Alors que, selon toute logique humaine, Jésus aurait pu ou dû s’éloigner des pécheurs, il les a plutôt rapprochés de lui. Ce faisant, il les a aussi rapprochés les uns des autres (Jn 17.22,23). Le Saint-Esprit poursuit cette œuvre, et nous, les « héritiers selon la promesse » (Ga 3.29), vivons avec tous les bénéfices de la vie, de la mort et de la résurrection de Jésus.

La pandémie actuelle nous a obligés à nous séparer et à nous isoler pour des raisons sanitaires ; cependant, elle a aussi mis en évidence et exacerbé les clivages existants dans nos sociétés. Nous vivons dans un monde profondément divisé. Ce qui me réconforte beaucoup actuellement, c’est que Christ a fait tomber toutes les frontières. Certes, nous ne sommes pas immunisés contre la contagion du péché et de ses effets (à l’exemple de la COVID), mais Jésus, lui, l’est complètement ! Il est avec nous dans les situations de confinement et de quarantaine, à travers les divisions et les troubles sociaux. Son ministère fixe la norme des relations humaines affectueuses et empathiques ; la croix offre le pardon de nos péchés contre Dieu et les autres, et proclame la solidarité avec les opprimés ; la résurrection proclame que l’injustice, la maladie et la mort ont été vaincues, et promet qu’elles seront abolies à tout jamais sur la nouvelle terre.

Notre Dieu est un Dieu de proximité et un Dieu de solidarité. Pour ceux qui placent leur confiance en lui, il est toujours proche, prêt à être un réconfort pour les solitaires et un guérisseur pour les affligés. Quelle bonne nouvelle pour les temps actuels !


1 Sauf mention contraire, toutes les citations des Écritures sont tirées de la version Louis Segond 1910.

2 Jürgen Moltmann, The Crucified God, New York, SCM Press, 1974, p. 205.

3 James Cone, The Cross and the Lynching Tree, Maryknoll, NY, Orbis Books, 2011, p. 151.


Sarah Gane Burton est écrivain pigiste et correctrice à Berrien Springs, au Michigan (États-Unis), où elle habite avec son mari et leurs deux enfants.