Jésus a-t-il aboli la loi sur la croix?

Méditations spirituelles 27/03/2021

IVÁN T. BLAZEN | L’ancien | Avril 2016

Pour répondre à la question: Jésus a-t-il aboli la loi sur la croix? il nous faut comprendre le thème d’Éphésiens comme un tout, ensuite suivre le flux de pensée du contexte immédiat du texte.

Le thème est bien résumé dans Éphésiens 1.9, et 10, qui déclare que Dieu a révélé le mystère de sa volonté dans la vie et la mort de Jésus-Christ. C’est le désir de Dieu que toutes choses dans les cieux et sur la Terre soient unies dans le Christ. En détaillant les composants de cette unité, l’épître enseigne que la séparation entre Dieu et l’humanité doit être résolue, les puissances malignes doivent être vaincues, et la séparation et l’hostilité entre les êtres humains doivent cesser. Le mystère maintenant révélé dans l’Évangile est que les Gentils doivent être héritiers avec Israël (3.6), les deux doivent former un corps et doivent ensemble prendre part à la promesse qui est en Christ Jésus.

Les Gentils deviennent citoyens

Dans Éphésiens 2, qui fournit le contexte immédiat au verset 15, la grâce de Dieu est exaltée (2.1- 10) comme la base pour l’unité entre les Juifs et les Gentils décrite au chapitre 2.11-22. Ce passage commence avec une description graphique de la condition éloignée et sans espérance des Gentils. D’un côté, ils sont appelés avec mépris «incirconcis» par les Juifs circoncis (2.11). D’un autre côté, les Gentils étaient «sans Christ, privés du droit de cité en Israël, étrangers aux alliances de la promesse, sans espérance et sans Dieu dans le monde » (2.12). Quelle image de malheur! Toutefois, un grand changement est en cours, parce que le verset 13 commence par un « mais », ce qui nuance tout ce qui précède. Les résultats de la révolution que le « mais » indique se trouvent dans Éphésiens 2.19- 22 : les Gentils ne sont plus étrangers ni des gens de passage, mais des concitoyens, des saints et membres de la famille de Dieu. La maison dont ils font main- tenant partie est édifiée sur le fondement des apôtres et des prophètes, avec Jésus-Christ comme la pierre angulaire. Incroyable, dans ce nouvel édifice ou temple spirituel, eux, qui auparavant étaient sans Dieu sont devenus une habitation pour Dieu !

Le Christ a uni Juifs et Gentils

Comment tout cela s’est-il produit ? Éphésiens 2.13-18 montre le chemin. Tout comme dans les temps anciens le sang sacrificiel était porté à l’autel, le lieu de la présence de Dieu, de même, par le sang du Christ, les Gentils ont été attirés auprès du peuple de Dieu, et de Dieu lui-même avec les Juifs. Le dé- but du verset 14 : « c’est lui notre paix », n’est plus « nous et eux », mais « nous ». La paix du Christ est aussi bien aux Gentils qu’aux Juifs. La paix est incarnée en Christ, et être unis à lui, c’est trouver de la paix sur la Terre et la paix avec le Ciel.

Le chemin à la paix est expliqué dans Éphésiens 2.14-16. Le Christ entreprend une action décisive «pour créer en sa personne, avec les deux, un seul homme nouveau en faisant la paix» (2.15). Juifs et Gentils sont faits un par trois évènements simultanés à la croix : Le Christ (1) renverse le mur de séparation ; (2) il met fin aux inimitiés ; et (3) abroge « la loi avec ses commandements et leurs dispositions ».

La pièce centrale est la fin des inimitiés, mentionnée non seulement au verset 14 mais aussi au verset 16, où, par la mort du Christ, les inimitiés sont abattues. Le Christ rend cela possible en renversant le mur intermédiaire de séparation érigé entre Juifs et Gen- tils. Ce mur est défini comme «la loi avec ses com- mandements et leurs dispositions [ou règlements]». Ces dispositions ou règlements sont ceux qui étaient à l’origine de la séparation et de l’hostilité entre Juifs et Gentils.

La barrière renversée n’est pas la loi morale de Dieu

Comment identifions-nous la loi avec ses commandements et leurs ordonnances qui formaient une barrière qui devait être renversée? On peut affirmer avec certitude que ce ne sont pas les principes moraux qui se trouvent dans la Loi de Dieu. Éphésiens 2.15 ne prend pas une position antinomique (contraire à la loi), et ne considère pas non plus l’abolition du commandement de Dieu de l’aimer lui ainsi que son prochain (Deutéronome 6.4, 5 et Lévitique 19.18), qui est amplifié dans les dix commandements (Exode 20.2-17) et approfondi par Jésus dans Matthieu 5.17-48, qui commence ainsi : « Ne pensez pas que je sois venu abolir la loi ». Est-ce que la dimension morale de la loi a provoqué l’inimitié entre Juifs et Gentils, de sorte que si les principes moraux étaient abolis le résultat serait la paix? Quelle sorte de paix ce serait si les normes fonda- mentales d’amour et de justice se perdaient? Le résultat serait la guerre au lieu de la paix !

Ce sont des considérations générales, mais dans Éphésiens, il y a en plus un certain nombre de considérations spécifiques que nous pouvons citer pour étayer notre conclusion. (1) En opposition avec le passé, quand nous étions fils de la désobéissance agissant en conformité avec le prince de la puissance de l’air (2.1,2), nous avons été « créés en Christ-Jésus pour des œuvres bonnes que Dieu a préparées d’avance, afin que nous les pratiquions » (2.10). (2) Ces bonnes œuvres incluent non seulement le commandement général d’aimer (4.15 ; 5.2,25), mais aussi des pratiques morales qui doivent être observées et des pratiques immorales qui doivent être évitées (4.17-5.20). Si l’instruction morale crée l’inimitié, alors Éphésiens a reconstruit le mur de séparation! (3) Très significatif: Le cinquième commandement se référant à l’honneur dû aux parents s’exprime avec un principe de validité continue et le relie à la promesse de vie éternelle (6.2,3). De plus nous devons nous rappeler que des Gentils furent attirés au judaïsme précisément en raison de leurs normes morales élevées.

«Les commandements et leurs ordonnances»

Si Éphésiens 2.15 n’a pas pour but la dimension morale de la loi, alors quel est-il? «Les commandements et leurs ordonnances» aux- quels fait référence Paul ont un lien avec la séparation entre Israël et les autres nations. Qu’avaient les Juifs qui visiblement les séparaient des Gentils ? Pour commencer, ils avaient le service du temple avec les sacrifices quotidiens, réglementés par les lois cérémonielles et les préceptes Juifs ajoutés après, ce qui différenciaient très clairement les Juifs des Gentils.

Cela peut être illustré par le tumulte soulevé contre Paul à Jérusalem, quand un groupe de Juifs a supposé qu’il avait introduit dans le temple le païen Trophime. Ils considéraient que cet acte avait profané le temple (Actes 21.28, 29), parce que les Gentils étaient réputés impurs (Actes 10.28). Une inscription déterrée en 1871 a encore plus clarifié l’expérience de Paul avec Trophime. L’inscription indiquait le mur de séparation entre la cour des Gentils et les cours des Juifs adjacents, et menaçait de mort le Gentil qui le traverserait. Certainement, une source d’hostilité!

Il est vrai qu’au temps de l’Ancien Testament Dieu a appelé Israël parmi toutes les nations pour être son peuple spécial. (Exode 19.5,6 ; 1 Rois 8.53). Différents préceptes ont maintenu cette séparation, par- mi lesquels la loi de la circoncision. Dans Éphésiens 2.11 Paul mentionne comment la circoncision divisait à cause de la façon dont les Juifs circoncis utilisaient le mot «incirconcis» de manière péjorative pour désigner les Gentils. Mais en Christ la circoncision n’est plus nécessaire, car les Gentils peuvent être le peuple de Dieu tout comme les Juifs et ensemble ils forment un seul homme nouveau (2.15), qui n’est plus ni Juif ni Gentil. Dans 1 Corinthiens 7.19 Paul dit que la circoncision et l’incirconcision ne sont rien (cf. Galates 6.15); ce qui importe est de garder les commandements de Dieu.

No seulement les lois cérémonielles très spécifiques dans l’Ancien Testament séparaient les Israélites des autres nations, mais dans les écrits juifs de la période intertestamentaire, où les lois juives se multipliaient, l’idée de séparation s’est fortement renforcée (cf. Marc 7.2-5). Ceux qui sont revenus de l’exil et leurs descendants étaient décidés de ne jamais retourner en exil et tentaient de protéger Israël de l’influence des cultures environnantes, et de cette façon ils ont renforcé le mur de séparation entre Juifs et Gentils.

Par conséquent, ce qui semble aboli dans Éphésiens comme «La loi avec ses commandements et leurs ordonnances » sont les lois cérémonielles et les règlements légaux qui rendaient difficiles aux Gentils de faire partie du peuple de Dieu. Quand cette barrière de séparation a été renversée par la croix, qui a été l’accomplissement du système cérémoniel de l’Ancien Testament et qui a condamné à mort les inimitiés (2.16), ce qui est apparu a été «avec les deux, un seul homme nouveau en faisant la paix» (2.15).