Elles ont demandé l'asile

Méditations spirituelles 28/06/2021

ADRA France | Trait d’Union N. 57, p. 4-5

Elles viennent du Tchad, du Rwanda, du Burundi, d’Éthiopie, d’Irak. Elles vivent dans un cada à Dunkerque, c’est-à-dire un centre d’accueil de demandeurs d’asile. Elles ont entre 30 et 45 ans environ.

Pourquoi sont-elles arrivées en France après de nombreuses aventures ? Pour certaines, elles ont été mariées de force trop jeunes. Victimes de violence, trompées, menacées, elles ont été obligées de fuir en abandonnant tout derrière elles : enfants, famille, pays. Ce sont des femmes blessées, déracinées, encore habitées par leur douloureux passé, par leur fuite, par toutes les embûches du voyage. Les voilà maintenant dans un pays où, pour certaines, elles doivent s’astreindre au difficile apprentissage d’une langue nouvelle dont les caractères et la syntaxe sont très différents de la leur. Pour toutes, c’est découvrir pas à pas une nouvelle culture et s’y adapter bon an mal an.

Pour les sortir de leur « enfermement » au CADA, où elles ne disposent que d’une chambre minuscule, des assistantes sociales les ont conduites à Claudette. Une femme remarquable, Claudette ! C’est elle qui, depuis des années, mène à bien les actions de notre antenne de Dunkerque avec sa formidable équipe. Et ces femmes brisées, qui ont laissé leurs enfants contre leur gré et auxquels elles pensent sans cesse, se retrouvent, dans un sympathique mélange de nationalités, de cultures, de religions, de langues et d’habitudes alimentaires, autour d’une table à éplucher des légumes !

Elles préparent ensemble les repas pour les migrants que sert l’antenne. C’est une occasion de détente, d’échanges, certainement aussi de joyeux quiproquos ! Le français du Tchad n’est pas exactement le même que celui du Rwanda-Burundi. L’Arabe que parle aussi notre Tchadienne ne correspond pas toujours à celui de notre Irakienne ! Elles préparent les repas à leur goût. Et les goûts sont différents ! Surtout pour les haricots ! L’une d’entre elles participe aux services sur le terrain.

L’antenne n’offre pas seulement des repas mais également des vêtements, couvertures, duvets, hygiène… Les femmes participent aussi au tri des habits reçus. La cuisine et les services des repas, la gestion des vêtements et leur distribution sont autant d’occasions pour ces femmes de donner d’elles-mêmes et d’acquérir petit à petit des responsabilités. En un mot retrouver leur dignité ! Elles ne vont pas oublier d’où elles viennent et les êtres chers qu’elles ne reverront peut-être jamais, mais doucement, grâce à l’écoute et la bienveillance de leur nouvel entourage, elles finiront par trouver une place, leur place, dans leur pays d’accueil. Nos amies Burundaise et Irakienne ont bien voulu nous partager un peu de leur histoire.

Nous n’avons pas besoin de détails. Nous saurons lire entre les lignes… Notre première amie a quitté l’Irak parce que menacée de mort plusieurs fois. À peine pubère, elle a été mariée de force à un homme trois fois plus âgé qu’elle. Plusieurs enfants sont nés de cette union. Mais elle veut une éducation. Elle devient professeur d’arabe et souhaite travailler pour défendre le droit des femmes. Son mari s’oppose catégoriquement à ses projets. Elle demande le divorce. S’ensuit une situation tellement intenable, qu’elle fuit. Elle trouve refuge en Iran pendant quelque temps.

Finalement la voilà en France demandant asile. Elle sait qu’elle ne pourra jamais retourner dans son pays.

Quant à notre deuxième amie, elle vient du Burundi où elle était membre d’une association de défense des droits de l’homme. Son mari est accusé de travailler de connivence avec les opposants au troisième mandat du président d’alors dont la candidature était jugée illégale et anticonstitutionnelle par de nombreux Burundais. Il prend la fuite et se réfugie dans un pays voisin. Elle se cache alors pendant quelque temps dans le pays et décide quand même de retourner chez elle. C’est alors que les membres du parti au pouvoir se vengent sur elle et porte atteinte à son intégrité et intimité de femme. Elle arrive finalement en France où sa fille étudie. Elle demande asile et elle vient d’obtenir protection en janvier cette année.


Evelyne Nielsen avec Claudette Hannebicque de l’antenne Adra Dunkerque. Pour suivre l’antenne, voir sa page facebook Adra Dunkerque


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