Celui que notre cœur désire

Méditations spirituelles 17/02/2022

Auteur : David A. Williams est professeur adjoint d’adoration et de musique sacrée au Séminaire adventiste de théologie, et codirecteur du Centre international pour l’adoration et la musique, à l’Université Andrews | Adventist World, février 2022.

Dans son récent ouvrage intitulé Desiring the Kingdom, James K. A. Smith affirme que « notre amour ultime, c’est ce que nous adorons. […] C’est ce que je désire, ce que j’aime qui anime ma passion 1. » Ainsi, l’adoration, c’est bien plus que de suivre une liturgie traditionnelle ou contemporaine. L’adoration, c’est soupirer après Dieu, aimer Dieu et le désirer de tout notre cœur.

Certains pensent souvent que « Désiré » est un nom prophétique pour le Christ en tant que Messie à venir. « J’ébranlerai toutes les nations. Et l’objet du désir de toutes les nations viendra, et je remplirai cette maison de gloire, dit l’Éternel des armées. » (Ag 2.7, DRB2) Cette prophétie ne parle pas seulement du Christ qui devait venir, mais aussi du désir ardent de tous les peuples de la terre. Tout au long des siècles, Jésus a été l’objet du désir de l’humanité. « Comme une biche désire l’eau du ruisseau, ainsi je te désire, toi, mon Dieu », écrit le psalmiste (Ps 42.2, PDV).

C’est ce qu’Ellen White comprenait profondément lorsqu’elle a écrit The Desire of Ages [Jésus-Christ]. Pendant des décennies, elle avait désiré écrire un ouvrage complet sur la vie du Christ. Dans les années 1890, elle en a eu l’occasion alors qu’elle habitait en Australie. Son livre Jésus-Christ est né de sa vie de piété, dans laquelle elle faisait l’expérience d’une adoration profonde en présence du Dieu qu’elle aimait, de son plus grand ami. Lorsqu’elle en commença la rédaction en 1892, elle cita dans son journal personnel le cantique « Jesus, Lover of My Soul »3 (Jésus, amoureux de mon âme).

En 1898, alors qu’elle terminait son livre, elle cita de nouveau un cantique : « Quel ami fidèle et tendre »4. Pour Ellen, désirer Jésus était la seule réponse raisonnable à l’amour de Dieu en Christ. Rien ne la satisfaisait autant que d’être avec Jésus. « Tout mon être soupire après le Seigneur. Quelques rayons de lumière occasionnels ne sauraient me suffire. Il m’en faut davantage 5. »

Dans la préface anglaise de Jésus-Christ, voici ce que déclarent les éditeurs : « Il entre dans le dessein de Dieu que ce désir ardent du cœur humain conduise à celui-là seul capable de le satisfaire. C’est lui-même qui nous inspire ce désir, afin de nous conduire à lui, plénitude et accomplissement même de ce désir. C’est en Jésus-Christ, le Fils du Dieu éternel, que se trouve cette plénitude 6. »

En lisant Jésus-Christ, on pense souvent que ce livre présente une vision historique de Jésus. Cependant, il va beaucoup plus loin que ça : il cherche à cultiver dans le cœur du lecteur une attitude d’adoration. Il lui demande : Qu’est-ce que ton cœur désire ? Quoi ou qui adores-tu ?

LA PERSPECTIVE DE L’ADORATION

Je suggère à l’Église de reconsidérer l’ensemble des écrits d’Ellen White, en particulier la série La grande controverse, en tant que traité sur l’adoration. La grande controverse entre Christ et Satan porte sur une question cruciale : l’amour pour Dieu ou l’amour de soi. Désirer Dieu est la seule réponse raisonnable à son amour bienveillant pour nous (Rm 12.1,2). Les lecteurs fervents de la série La grande controverse ont vite remarqué la première et la dernière phrase de l’ensemble de l’ouvrage : « Dieu est amour ».

Patriarches et prophètes, premier livre de cette série, commence par ces mots ; La tragédie des siècles, cinquième et dernier livre, se termine par un passage doxologique des plus profonds : « De l’atome le plus imperceptible aux mondes les plus vastes, tant des êtres animés que des objets inanimés, s’élève, par la voie de leur beauté incomparable et de leur joie sans mélange, un cantique d’allégresse proclamant que Dieu est amour 7. » Ellen White encadre et concentre le récit sur l’adoration. Deux paragraphes plus tôt, elle écrit : « À mesure qu’ils se dérouleront, les siècles éternels apporteront avec eux des révélations toujours plus glorieuses de Dieu et de son Fils. Le progrès dans l’amour, la révérence et le bonheur marchera de pair avec celui des connaissances. Plus les hommes apprendront à connaître Dieu, plus aussi grandira leur admiration de son caractère. Et au fur et à mesure que Jésus dévoilera aux élus les mystères de la rédemption et les résultats du grand conflit avec Satan, leurs cœurs tressailliront d’amour et de joie, et le chœur de louanges exécuté par mille millions de rachetés s’enflera, puissant et sublime 8. »

Comment Ellen White intègre-t- elle cette perspective de l’adoration dans son troisième volume de la série ? Tel un chiasme, le livre au cœur de cette série est le plus important, car il se concentre sur une chose : désirer Jésus. Elle commence son livre en déclarant que Jésus est l’« Emmanuel », Dieu avec nous, l’image de Dieu, l’éclat de sa gloire. « C’est pour manifester cette gloire qu’il est venu en ce monde 9. » Quelle est cette gloire ? La lumière de son amour, son caractère rayonnant 10.

LA MISSION DE JÉSUS

Jésus est venu pour louer le Père par la révélation de son caractère bienveillant. « Dans la prière qu’il a formulée en faveur de ses disciples, il a dit : “Je leur ai fait connaître ton nom,” – “miséricordieux et compatissant, lent à la colère, riche en grâce et en fidélité,” – “afin que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux, et que moi, je sois en eux 11.” »

Plus important encore, Ellen White déclare explicitement que le but de la mission du Christ était l’adoration. « [Jésus était venu] pour enseigner la signification du culte divin »12. Chaque miracle, chaque conflit, chaque acte de miséricorde devait révéler la gloire de Dieu, insuffler aux cœurs humains le désir de Dieu et l’affection pour lui dans l’adoration.

J’invite donc l’Église mondiale à reconsidérer la lecture des écrits d’Ellen White à travers les lunettes mêmes de celle-ci. La mission de Jésus ici-bas consistait à révéler l’amour de Dieu afin que nous puissions aimer Dieu et le désirer en retour. L’adoration authentique, c’est ça ! De plus, parce que notre Seigneur ressuscité vit, il nous donne son Saint-Esprit pour rendre notre adoration possible et pour la vivifier. Il libère nos volontés et ravive nos affections. Il nous attire en sa présence et incite notre cœur à le désirer. Jésus a toujours été le Désiré des nations. À chacun de nous, il demande aujourd’hui : Veux-tu me désirer par-dessus tout et m’adorer ?


1 James K. A. Smith, Desiring the Kingdom, Grand Rapids, Baker Academic, 2009, p. 51. Voir aussi James K. A. Smith, You Are What You Love, Grand Rapids: Brazos Press, 2016.
2 Sauf mention contraire, toutes les citations des Écritures sont tirées de la version Louis Segond 1910.
3 The Seventh-day Adventist Hymnal, Washington, D.C., Review and Herald Pub. Assn,. 1985, n° 489.
4 Hymnes et louanges, n° 320.
5 Ellen G. White, manuscrit 20, 1892.
6 The Desire of Ages, Mountain View, Calif., Pacific Press Pub. Assn., 1898, 1940.
7 Ellen G. White, La tragédie des siècles, p. 737.
8 Ibid., p. 736.
9 Ellen G. White, Jésus-Christ, p. 9.
10 Idem., Vers Jésus, p. 15.
11 Ellen G. White, Jésus-Christ, p. 9.
12 Ibid., p. 68.