Mes rendez-vous avec l’artiste divin dans sa salle d’attente ! Dans la salle d’attente de l’orfèvre au regard de feu (1)

Méditations spirituelles 21/08/2022

21 août 2022 | Jean-Michel Martin, collaborateur, est Praticien en psychothérapie et Aumônier

Un peintre invita un jour un ami à venir chez lui pour lui montrer son dernier tableau. Lorsque l’ami arriva, le maître le fit attendre dans une pièce peu éclairée. Ensuite il lui dit : « Peut-être as-tu trouvé étrange que je t’aie fait attendre aussi longtemps dans cette pièce. Mais si tu étais entré dans le studio avec la luminosité de la rue dans les yeux, tu n’aurais pas pu apprécier les finesses de la couleur de la peinture de mes toiles. C’est pourquoi je t’ai laissé un moment dans l’obscurité, jusqu’à ce que tu ne sois plus ébloui… »[i].

Souvent, nos yeux ne voient plus clair et nous nous laissons aveugler par les mirages de la vie. La soif d’une promotion professionnelle, de l’aisance financière, le désir d’être bien habillé et d’en imposer par notre aspect extérieur, l’envie d’être célèbre, etc. …, peuvent nous empêcher de voir clairement la ligne tracée par les Écritures. La simplicité de l’Évangile brille de sa propre barrière, mais pour que nous puissions l’apprécier et y répondre comme nous sommes appelés à le faire, il nous faut d’abord passer par un rendez-vous dans la salle d’attente de Dieu, l’artiste divin, qui peut nous conduire à passer par un tunnel, par une période sombre, d’ombre plus ou moins persistante, par le temps de l’épreuve parfois ou de la mise en retrait provisoire, et qui en même temps est un périmètre de sécurité, un écran salutaire et protecteur face à une lumière parfois trop vive et agressive.

Nous devons nous libérer et nous désintoxiquer de nos aveuglements personnels et collectifs, car comme le dit 1 Jean 2.16 : « car tout ce qui est dans le monde, la convoitise de la chair, la convoitise des yeux, et l’orgueil de la vie ne vient pas du Père, mais du monde ». Pour que nos yeux apprécient ce qui plaît à Dieu, il nous faut désapprendre, en passant par un stage spécial, par une sorte de cure de désintoxication, comme Moïse dû le faire, selon Actes 7.22 : « Moïse fut instruit dans toute la sagesse des Égyptiens, et il était puissant en paroles et en œuvres ». Cependant, comme le précise Hébreux 11.24-26 : « C’est par la foi, que devenu grand, Moïse refusa d’être appelé fils de la fille de Pharaon. Il préféra être maltraité avec le peuple de Dieu plutôt que d’avoir pour un temps la jouissance du péché. Il regarda l’opprobre de Christ comme une richesse plus grande que les trésors d’Égypte, car il avait les yeux fixés sur la rémunération ».

Pour que Moïse puisse voir, au-delà de sa couronne périssable, la couronne éternelle, le Maître l’a fait attendre, un moment, en le faisant désapprendre dans le désert, qui fut en quelque sorte la salle d’attente où il lui avait fixé rendez-vous ! Pour que nous puissions voir au-delà de l’aveuglement provoqué par les néons qui nous entourent, peut-être devons-nous d’abord traverser un tunnel obscur, une épreuve, un apprentissage, qui nous permet de distinguer la véritable lumière et d’apprécier toutes les nuances des couleurs dans la palette de nos vies. Demandons à Dieu de nous permettre de le rencontrer dans sa salle d’attente, lui, le grand artiste peintre divin !

Dans la salle d’attente de l’orfèvre au regard de feu, qui purifie l’argent ou l’or pour y voir son propre reflet !

Nous lisons un texte au demeurant assez étrange dans Malachie 3.3 : « Il s’assiéra, fondra et purifiera l’argent. Il purifiera les fils de Lévi, il les épurera comme on épure l’or et l’argent, et ils présenteront à l’Éternel (YHWH) des offrandes avec justice ». Quel est donc le sens de ce texte, et en particulier, quel est le travail de l’orfèvre [ii] ?

Son nom vient du latin auri et faber, qui signifie artisan de l’or. Dans son atelier, cet artiste-artisan œuvre à la fabrication, à la transformation ou à la restauration d’objets liés au culte, à l’usage domestique, à l’ameublement ou à l’art de la table, alors que les monnaies ou les médailles sont du domaine du fondeur, tandis que les bijoux sont du domaine du bijoutier-joaillier.

Il soumet les morceaux d’or ou d’argent au feu, à l’endroit même où les flammes sont les plus fortes, où la chaleur est la plus vive, pour que toutes les impuretés soient brûlées. Il est artisan de l’argent, de l’or, des métaux précieux, et il effectue plusieurs activités complémentaires : ainsi il sait façonner une forme par martelage ; il est tourneur, repousseur, ciseleur, monteur, restaurateur d’anciennes œuvres, etc.

Ce feu nous fait penser aux épreuves, aux tentations, aux difficultés que nous traversons, et que nous appelons le baptême du feu, à la lumière de l’étape incontournable par laquelle Jésus devait passer à Gethsémané et à Golgotha et dont il parle en Luc 12.49-50 : « Je suis venu jeter un feu sur la terre, et qu’ai-je à désirer, s’il est déjà allumé ? Il est un baptême dont je dois être baptisé et combien il me tarde qu’il soit accompli ». C’est ce moment difficile avec lequel il avait rendez-vous, avec la trahison de ses disciples, les tortures de ses bourreaux, la mort sur la croix, où Dieu s’est tenu à ses côtés. Chaque croyant sait que des moments aussi douloureux l’attendent lui aussi, car ce baptême du feu complète immanquablement son baptême d’eau (immersion, purification,) ; puis son baptême d’esprit (adoption par le papa céleste), où Dieu lui dit, par son esprit déversé en lui, et à l’image de l’expérience de Christ en Matthieu 3 et 4, qu’il est son « fils bien-aimé ». Ce même Esprit avait conduit Jésus dans le désert pour y être tenté, par le diable. Notre parcours aussi suit ces étapes (pas forcément dans le même ordre), mais au moment de la difficulté, de l’épreuve (donc du baptême du feu), il est fondamental de se rappeler la certitude acquise lors du baptême d’esprit : Dieu m’a adopté et je suis son enfant bien-aimé, à tout jamais !

À chacune des saisons de notre cheminement, Dieu, l’artiste aux multiples compétences, se tient à nos côtés, nous convoquant dans sa salle d’attente, et il nous invite à accepter son soutien fécond dont il parle, à sa façon, dans Apocalypse 3.18 : « Je te conseille d’acheter de moi de l’or éprouvé par le feu, afin que tu deviennes riche… » L’orfèvre se tient tout le temps devant le feu, même quand ses flammes sont les plus vives, tenant l’argent ou l’or pendant qu’il est raffiné par ses soins au moyen justement de ce feu. Il ne peut ni le mettre sur un autre support ni dévier ou détourner le regard, restant attentif, attentionné et vigilant, car si la matière de l’argent ou l’or était soumise au feu une seconde de trop, elle deviendrait inutile, et tous ses efforts auraient été en vain.

Une dernière question à laquelle il faut répondre : « À quel moment l’orfèvre sait-il que l’argent ou l’or est complètement raffiné ? » Et bien quand sa propre image se reflète dedans !

Au moment le plus ardent de nos épreuves, il est bon de nous rappeler que Dieu désire que son image soit reflétée en nous, et il n’éloigne pas un seul instant les yeux de moi ou de toi. Quand les flammes nous raffinent, il nous éloigne d’elles avant notre destruction, et c’est justement en cet instant que nous apprenons la leçon de cette vie qui nous permet de refléter son amour, sa sensibilité et sa compassion. Rien n’arrive par hasard, et rien n’échappe au regard attentif et attentionné de notre orfèvre de Père ! Il a les yeux fixés sur nous, pour que nous soyons transformés à l’image de son Fils, au cœur même des épreuves, de la douleur ou de la souffrance. Dans Romains 8.29 nous lisons : « … Car ceux qu’il a connus d’avance, il les a aussi prédestinés à être semblables à l’image de son Fils, afin que son Fils soit les premiers-nés (προτώτοκος) de beaucoup de frères ». Jésus est donc le prototype d’une longue série de femmes et d’hommes, qui par leur passage salutaire, non pas au milieu des flammes de l’enfer, mais de l’épreuve, vécue en sa présence et après convocation dans sa salle d’attente, ont bénéficié du travail cathartique, purificateur de l’orfèvre divin, à l’image de ce que trois croyants de l’Ancien Testament, mentionnés dans Daniel 3.12 et suivants, ont expérimenté, en la personne de Schadrac, Meschac et Abed-Nego, compagnons du prophète Daniel, et qui ne s’étaient pas inclinés devant la statue d’or érigée par le roi Nebucadnetsar. Ils sortirent indemnes de la fournaise ardente, au milieu de laquelle se tenait un personnage étrange, dont on dit au verset 25 « … la figure du quatrième ressemble à celle d’un fils des dieux… » C’est le roi Nebucadnetsar lui-même qui donne le mot de la fin au verset 28 : « … Béni soit le Dieu de Schadrac, de Méschac et d’Abed-Nego, lequel a envoyé son ange et délivré ses serviteurs qui ont eu confiance en lui, et qui ont violé l’ordre du roi et livré leurs corps plutôt que de servir et d’adorer aucun autre dieu que leur Dieu (Eloah) ! ».


[i] Enrique CHAIIJ, La vie est belle malgré tout, IADPA, Doral, Floride, Etats Unis d’Amérique, 2013 p.130.
[ii] Wikipédia, art. « Orfèvre ».