Les prières de Noël du major

Méditations spirituelles 11/12/2021

Par : Dick Duerksen. Article publié sur la revue Adventist World, décembre 2021, page 28 et 29

Ce train est aussi froid que le Mont Everest !, pense le major Victor. Plus froid, peut-être. Seigneur, s’il te plaît, garde-moi bien au chaud.

Nous sommes en hiver, pendant la Seconde Guerre mondiale. Le train de transport de troupes emportant le major Victor fonce vers le nord, à travers le désert du Sinaï. Le temps est humide et glacial. Les fenêtres des wagons étant dépourvues de vitres, les sièges sont recouverts d’une glace de plus en plus épaisse. Les hommes se sont installés dans les porte-bagages, où il fait un peu plus chaud. Même là, blottis les uns contre les autres, ils gèlent.

Le major Victor de l’armée américaine et ses deux compagnons, les sergents Eaton et Brennon, se rendent à Jérusalem, puis traversent le désert jusqu’en Irak. Victor, officier et médecin adventiste, prie pour que Dieu leur fournisse suffisamment de chaleur pour les garder en vie jusqu’à leur arrivée à Jérusalem.

Lorsque le train s’arrête pour de l’eau et du charbon à une voie de garage, le sergent Eaton dit : « Prenez vos affaires et venez avec moi. »

Les deux soldats suivent Eaton le long des voies vers la locomotive. Eaton s’arrête, sort sa tasse de cantine, passe la main derrière l’une des énormes roues, ouvre un robinet, et remplit sa tasse d’eau chaude. Après avoir aussi rempli les tasses de ses compagnons, il grimpe l’échelle jusqu’à la cabine.

Occupés à vérifier l’eau et le charbon, l’ingénieur de locomotive et le pompier ont laissé leurs sièges vides dans la locomotive toute chaude. Le sergent Eaton sourit, fait signe aux autres de le rejoindre, et s’assit dans le fauteuil de l’ingénieur.

Lorsqu’ils atteignent l’échelon supérieur et pénètrent à l’intérieur, l’air froid a cédé sa place à l’air chaud. « Prière exaucée, souffle le major Victor. Du moins jusqu’à ce que l’ingénieur nous expulse de son siège ! »

Alors qu’il attend que le signal de la voie change, Eaton joue avec les commandes, vérifie les jauges, tâte les leviers de frein et teste l’accélérateur, le visage illuminé d’un sourire.

Mais avant même que ces hommes aient le temps de se détendre, le « vrai » ingénieur apparaît au dernier échelon de l’échelle et se met à vociférer.

Eaton lui fait signe de venir s’asseoir à sa place. Ce dernier obtempère, mais toujours en criant et en faisant de grands signes.

Victor, lui, est en train de prier, comme il en a l’habitude quand les choses dérapent. Sachant que Dieu va devoir accomplir un miracle pour qu’ils s’en sortent, il fait monter une prière brève et simple. Au secours !, est tout ce qu’il arrive à dire.

Eaton, du haut de ses près de 1,83 mètres, se tient à côté du siège en acier et désigne le nom cousu sur son uniforme, puis le mur d’acier derrière le siège.

« Eaton », dit-il en pointant de nouveau son nom, puis le mur.

Le « vrai » ingénieur regarde l’uniforme d’Eaton, puis le mur où un nom est gravé dans l’acier. « Eaton », est-il écrit. Le même nom que celui de cet homme qui s’est assis sur sa chaise ! « Comment est-ce possible ? » demande-t-il dans un langage des signes que les deux hommes comprennent.

« Le gouvernement américain a expédié ici plusieurs de ces locomotives pour aider à transporter les troupes jusqu’aux champs de bataille, explique Eaton. Les locomotives viennent des montagnes où elles tiraient auparavant de longs trains de billots jusqu’aux ports. L’une d’elle était la mienne, et en tant qu’ingénieur, j’ai gravé mon nom sur le mur dernière cette chaise. C’est ma locomotive ! » Le « vrai » ingénieur s’incline, actionne le sifflet et regarde le sergent Eaton conduire le train de troupes en direction de Jérusalem. Deux « vrais » ingénieurs se partagent maintenant les tâches dans la locomotive, où tout le monde est bien au chaud.

Merci mon Dieu, murmure le major Victor.

Au petit matin du 24 décembre, le train entre dans Jérusalem. Le major Victor remercie tout le monde pour le trajet au chaud, puis fait signe aux sergents de le suivre dans la vieille ville.

« Ça serait spécial de passer Noël à Jérusalem, dit-il à ses amis, mais depuis des années, je rêve de me trouver, la veille de Noël, à Bethléhem – la ville où Jésus est né. Pensez-vous que c’est possible ? »

Les sergents savent ce qu’il faut faire pour transformer des rêves en réalité. Brennon s’assure que leur équipement est en ordre, tandis qu’Eaton, lui, s’occupe du transport. Et Victor prie. Ce n’est peut-être pas un besoin urgent dans le ciel, chuchote-t-il, mais ce serait vraiment bien si nous pouvions être à l’église de la Nativité quand les étoiles apparaîtront ce soir ! Puis, il énumère toutes les raisons pour lesquelles il espère que Dieu répondra à sa prière.

Eaton revient avec un taxi, et Brennon met leurs affaires dans le coffre. En cette veille de Noël, la circulation routière est terrible ! Eaton aurait préféré rester dans le train, mais juste avant le coucher du soleil, les voilà roulant à travers la foule à l’entrée de Bethléhem.

« Bethléhem… la veille de Noël », se souvient le major Victor. Je savais que la date était sans doute fausse, et que la crèche n’était qu’une piètre imitation de celle dont Marie s’était servie pour y coucher Jésus. Mais c’était quand même Bethléhem ! Une ville grouillante de visiteurs, remplie de musique et d’attentes. Une ville impatiente d’accueillir le Messie. »

« Nous avons laissé la voiture près de la porte, raconte le major, et nous nous sommes déplacés lentement à travers la foule composée de gens et de moutons. Trois soldats américains, marchant d’un pas léger comme sur une terre sainte, écoutaient les chœurs d’enfants proclamant la naissance du Fils de Dieu, chantant des chants qui nous ont donné le mal du pays – et du paradis. »

Pour entrer dans l’église de la Nativité, il faut franchir une porte basse en se penchant. La seule lumière provient des bougies vacillantes. Les prières chuchotées et les doux chants de Noël sont les seuls sons qu’on y entend.

Victor traverse le sanctuaire jusqu’à la petite salle en arrière où se dresse la crèche.

Bien-aimé Jésus, prie-t-il alors que des larmes d’action de grâces salent ses paroles, me voici ici – près de l’endroit même où tu es né dans ce monde. Je suis venu t’adorer, mais je n’ai aucun présent à t’offrir, si ce n’est moi-même. Puisque je suis déjà ta propriété, je te demande simplement de me remplir de ta présence et de ta puissance. Donne-moi la force de te représenter, et le cœur d’aimer pour toi.

Le silence s’installe doucement dans la salle, légèrement remplacé par les voix des enfants qui chantent des chants angéliques.

« Cette nuit-là, Dieu a répondu à ma prière, conclut le major Victor. Je me suis agenouillé dans l’atmosphère élevée et sainte de la présence de Dieu, et ma vie a été changée à tout jamais. Le riche courant de son amour a traversé mon âme. Je suis à lui. Je lui appartiens. »


Dick Duerksen, pasteur et conteur, habite à Portland, en Oregon, aux États-Unis.